Max von Oppenheim, 1899

Dossier 1914-1918

Le djihad au cœur des inquiétudes britanniques dans le monde musulman

L’historiographie de la première guerre mondiale au Proche-Orient a maintes fois souligné le rôle joué par le Royaume-Uni dans l’encouragement à la révolte arabe en 1916 contre l’empire ottoman. T.E. Lawrence, principale figure britannique de la révolte arabe, affirmait dans les années 1920 que Londres avait agi pour aider les Arabes à s’émanciper d’une Turquie décomposée et à l’agonie. Mais par la suite, de nombreux historiens ont démenti cette vision des choses. Ils ont démontré que le Royaume-Uni avait fondé sa politique au Proche-Orient sur l’opportunisme militaire, la peur de l’expansion russe et française et la volonté de dominer les Arabes et les juifs.

Plusieurs historiens et d’autres chercheurs ont mis l’accent sur l’influence notable de l’Allemagne impériale dans l’élaboration des décisions en temps de guerre du Royaume-Uni. Ils ont montré comment, même avant la guerre, l’Allemagne avait remplacé la France et la Russie comme principal rival de Londres au Proche-Orient. L’empereur allemand Guillaume II poursuivit après 1894 une « politique globale » (Weltpolitik) et ce que l’historien allemand Fritz Fischer a nommé en 1961 une « compétition pour l’hégémonie mondiale. » Dans ce contexte, Berlin a travaillé à élargir l’influence économique et militaire du Reich dans l’empire ottoman. En 1903, la Sublime Porte accorda une concession à l’Allemagne pour construire un prolongement du chemin de fer d’Anatolie à la Mésopotamie et vers Bagdad, se terminant dans la province ottomane du Koweït sur le golfe Persique. En outre, à la fin des années 1890, Guillaume II et d’autres responsables allemands avaient la conviction que, dans le cas d’une guerre future entre les puissances européennes, l’Allemagne pourrait organiser et exploiter un islam fanatique et unifié – le panislamisme – au profit de ses objectifs. L’empire britannique surtout rassemblait un grand nombre de sujets musulmans qui, de l’avis du Keiser, pouvaient être utilisés.

Les Britanniques semblaient eux aussi obsédés par le panislamisme, surtout après 1905 quand la tension montait entre les puissances européennes. Une doctrine ottomane, qui proclamait l’autorité religieuse du sultan-calife sur les musulmans à travers le monde, appelait les musulmans à défendre l’empire ottoman et le califat comme la « vraie » foi, contre les autres, en particulier l’infidèle chrétien occidental. L’anxiété se répandait parmi certains dirigeants britanniques qui craignaient une « guerre sainte » (djihad) musulmane dirigée contre la domination britannique en Inde et en Égypte et ailleurs dans l’empire britannique.

À cet égard, les événements qui avaient cours dans l’Égypte sous contrôle britannique déconcertaient les Britanniques. Au Caire, Max Freiherr von Oppenheim, riche rejeton d’un banquier allemand, orientaliste et archéologue (et juif converti au christianisme), servit comme diplomate allemand de 1896 à 1910. Dans ce rôle, Oppenheim, pro-arabe et pro-ottoman et qui éprouvait un profond ressentiment vis-à-vis du Royaume-Uni et de son empire en Égypte, en Inde et ailleurs, s’engagea dans de nombreuses activités visant à saper la domination britannique en Égypte. Le protégé d’Oppenheim, Curt Prüfer, un drogman du consulat général allemand, participa à plusieurs de ces activités. Pendant et après 1911, Oppenheim vécut en Syrie, faisant des fouilles dans les ruines hittites. Vivant parmi les Arabes et les Kurdes locaux, il chercha à acheter le soutien de chefs tribaux pour le chemin de fer de Bagdad, principal projet de l’Allemagne pour étendre son influence au Proche-Orient. Pour cette raison parmi d’autres — incluant le leadership dominant de Lord Kitchener en Égypte entre 1911 et 1914 —, au tout début de la première guerre mondiale, c’est Le Caire qui disposait de l’influence prépondérante sur la politique orientale du Royaume-Uni.

Après 1908, l’émergence du régime des Jeunes-Turcs à Constantinople et le renversement du sultan Abdul Hamid II en faveur de son frère, Mehmed V, ont peu fait pour apaiser le malaise britannique. Les Jeunes-Turcs poursuivirent une vigoureuse défense de l’empire ottoman et du califat. La Sublime Porte a continué d’appliquer la politique ottomane traditionnelle et à gouverner les Arabes avec violence et une poigne de fer. En réponse, une idéologie nationaliste arabe, appelée « arabisme » se diffusait progressivement, proclamant que les Arabes étaient un peuple qui possédait des vertus et des droits particuliers et qui méritait une certaine forme d’autonomie au sein de l’empire ou l’indépendance complète en dehors.

Dès 1912, Kitchener et Le Caire étaient suffisamment préoccupés par la capacité des Ottomans à « tenir » les restes de leur empire pour que Kitchener rencontre Abdullah, le fils du chérif de la Mecque Hussein ibn Ali. Le chérif gouvernait alors pour les Ottomans la région de l’ouest de l’Arabie, le Hedjaz, qui comprenait les deux villes saintes de La Mecque et Médine. Kitchener commençait à croire que les intérêts britanniques pourraient nécessiter un soutien aux séparatistes arabes ou à leurs aspirations nationalistes. De plus en plus, lui et ses lieutenants au Caire voyaient le chérif comme un possible futur calife, mieux disposé vis-à-vis des intérêts de Londres au Proche-Orient.

La révolution dans la guerre

La guerre éclata en Europe en août 1914 et elle se répandit rapidement au Proche-Orient. Le 2 août, les Allemands concluaient une alliance avec les Ottomans, et deux mois plus tard les Turcs entraient en guerre aux côtés de Berlin. Le 14 novembre, le sultan ottoman Mehmed V, agissant en tant que calife, appelait tous les musulmans dans le monde à la guerre sainte contre les nations ennemies de Constantinople — les Alliés : le Royaume-Uni, la Russie et la France.

Mais avant même la proclamation du djihad par le sultan, Berlin envoya, à la demande pressante d’Oppenheim et avec le soutien de Guillaume II et des principaux responsables politiques et militaires allemands, de petites missions d’agents allemands à travers Constantinople pour faire de la propagande panislamique, visant à atteindre la Perse, l’Afghanistan, l’Éthiopie, le Soudan et la Libye. Dans certains cas, comme avec la Perse et la Libye, des efforts furent faits pour expédier des armes à des chefs de tribus de façon à les inciter à attaquer le Royaume-Uni. En outre, l’Autriche, alliée de l’Allemagne dans la guerre, envoya un émissaire en Arabie du Nord pour tenter de réconcilier les puissants chefs arabes Ibn Rachid et Ibn Saoud, et les unir derrière les Ottomans. La politique allemande visait à faire la guerre dans la région en fomentant un soulèvement, une « révolte » de tous les musulmans contre l’empire britannique.

Du côté britannique, cette situation renforçait la vieille idée de Kitchener, à présent secrétaire d’État à la guerre, selon laquelle les Turcs et le panislamisme soutenus par les Allemands constituaient une menace majeure. Il ordonna à la résidence britannique au Caire de poursuivre les négociations secrètes commencées avant la guerre avec Abdullah. Kitchener continua de répandre l’idée de l’usage éventuel de la stratégie de « guerre par la révolution » — incitant les Arabes à se révolter contre les Ottomans.

Bien que le Royaume-Uni ait été en désaccord avec la France sur le fait de décider lequel d’entre eux devait approcher les Arabes, des adhérents locaux du mouvement panarabe au Caire envoyèrent des émissaires en Arabie, en Syrie et en Palestine. Ces derniers communiquèrent aux chefs arabes le message britannique, les exhortant à ne pas rejoindre la Porte si elle entrait en guerre. Si la guerre arrivait, dirent les messagers aux chefs arabes, ils pouvaient espérer recevoir des armes et des munitions des Britanniques.

À la fin du mois d’octobre, Le Caire recevait une réponse du chérif de la Mecque par l’intermédiaire d’Abdullah, disant qu’il ne soutiendrait pas les Turcs. Kitchener répondit rapidement, disant à Abdullah que si la « nation arabe » s’alliait au Royaume-Uni, Londres protégerait la sécurité et la liberté de l’Arabie contre les Ottomans. Il évoqua en outre la possibilité d’établir un nouveau califat à la Mecque ou à Médine -– cependant uniquement spirituel.

Mais, chose totalement ignorée des Britanniques, les Allemands et les Turcs ont rencontré des problèmes presque partout où ils ont envoyé des émissaires –- de la Libye à l’ouest de l’Afghanistan et à la Perse à l’est -– en cherchant à déclencher des révoltes armées contre l’empire britannique. Même l’entrée en guerre de l’empire ottoman le 29 octobre, avec le bombardement des ports de la mer Noire par les navires allemands et l’appel à la guerre sainte qui a suivi, n’ont pas changé grand-chose à la campagne problématique d’un État chrétien appelant les musulmans à la « révolution » contre les Britanniques.

Néanmoins, les Britanniques se sentaient menacés. En Égypte, le commandant militaire Sir John Maxwell appela près de cinq cent cheikhs au Caire, pour les presser de jurer fidélité au Royaume-Uni. Le 2 novembre, après avoir reçu la nouvelle que depuis Constantinople, le khédive (vice-roi ottoman) d’Égypte Abbas Hilmi avait appelé les Égyptiens à s’opposer aux armées britanniques, Londres proclamait la loi martiale. En décembre, les Britanniques faisaient de l’Égypte un protectorat et déposaient Abbas Hilmi. Et nommaient son oncle, Hussein Kamil Pacha, fidèle à la Couronne, à la tête d’un nouveau sultanat.

Le Caire était également inquiet à propos de la Libye. Des rapports indiquaient que des émissaires germaniques avaient contacté les Senoussi, un ordre religieux important en Libye, pour qu’ils se joignent à l’effort de guerre allemand. La nouvelle attisait les craintes d’une attaque de ces derniers à l’ouest de l’Égypte, laquelle pourrait créer des troubles dans toute l’Afrique du Nord. Pour sa part, le chef de la tribu, Cheikh Al-Senoussi, négociait avec les deux parties. D’autres informations venues d’Arabie semblaient indiquer que les démarches turques initiales auprès des chefs tribaux avaient échoué à obtenir leur soutien à la Porte.

Malgré tous ces signaux, à la fin de 1914 les dirigeants britanniques en Égypte, en Inde et ailleurs dans le Proche-Orient étaient de plus en plus inquiets à propos du djihad proclamé par la Turquie et soutenu par l’Allemagne. On ignore à quel point, cette situation pesa sur le débat houleux qui surgit à Londres concernant la stratégie militaire. Kitchener avait été longtemps inquiet du danger encouru par un panislamisme parrainé par les Ottomans et soutenu par la puissance allemande. Lui et d’autres « Orientaux » à Londres avancèrent l’idée que, compte tenu de l’impasse mortifère et coûteuse du front de la guerre en France, les armées françaises devaient maintenir la ligne de front tandis que l’Angleterre consacrerait ses armées nouvellement levées à l’attaque de l’ennemi en quelque endroit plus vulnérable, de préférence dans le Proche-Orient.

En apparence, le plan semblait brillant ; il visait à forcer la Turquie à abandonner le combat, soulager les Serbes et les Russes, exercer une pression sur les armées austro-hongroises et en finir avec l’impasse en France. Déjà, début novembre, l’amirauté britannique, presque complètement seule, ordonnait un bombardement naval des forts ottomans dans les Dardanelles -– lourde erreur militaire qui, alertant les Turcs, les incita à renforcer leurs défenses du détroit et de la péninsule de Gallipoli.

Des espoirs déçus

L’année 1915 fut inaugurée par des opérations militaires des deux côtés. Les Ottomans, sous la pression des Allemands, attaquèrent le canal de Suez. Presque simultanément, les Britanniques, à la recherche d’une victoire militaire d’envergure contre les Ottomans, lancèrent un assaut massif sur Gallipoli. Mais aucune de ces opérations militaires ne fut couronnée de succès. Quelques dirigeants britanniques, dont le ministre de la guerre Kitchener et le commandant militaire du Caire Sir John Maxwell, ne sous-estimaient pas la menace ottomane sur le canal. Ils réclamèrent avec insistance l’arrivée en Égypte de troupes venues d’Inde, une meilleure préparation des forces britanniques au Caire et à Alexandrie et la suppression des garnisons égyptiennes stationnées au Soudan.

Les 2 et 3 février 1915, le huitième corps de la quatrième armée ottomane, commandée par le Jeune-Turc Djemal Pacha assisté de conseillers germaniques parmi lesquels le drogman Prüfer, attaqua le canal, dans l’espoir que l’assaut provoquerait un soulèvement contre les Britanniques. L’attaque échoua à tous points de vue. Parmi les causes de cet échec, le fait que la campagne turque ne reçut aucun soutien des grands chefs de tribus d’Arabie, ce qui n’échappa pas aux Britanniques.

Néanmoins, l’attaque ottomane avortée sur le canal alimenta davantage l’inquiétude de Londres. Du côté ennemi, les Allemands croyaient que l’attaque avait suffisamment alarmé les Britanniques pour les persuader de conserver un grand nombre de troupes en Égypte au détriment des forces du front ouest en Europe. Mais en fait, la campagne contre le canal a probablement moins détourné les troupes britanniques de l’Europe que de l’offensive coûteuse et désastreuse sur Gallipoli, qui avait commencé le 19 février. Malgré les départs réguliers de divisions indiennes, australiennes et néo-zélandaises de l’Égypte vers Gallipoli, le nombre d’hommes dans la garnison égyptienne est resté essentiellement le même, entre environ soixante-dix et cent mille.

Mais l’attaque ratée de Gallipoli avait multiplié les craintes des Britanniques d’un monde arabe potentiellement hostile. Les débarquements dans la péninsule en avril et en août furent catastrophiques, repoussés par les forces ottomanes avec l’aide des conseillers et des troupes germaniques ; les assaillants subirent des pertes massives. De surcroît, la progression lente et difficile des forces anglo-indiennes dans le sud de la Mésopotamie perturbait Le Caire et Londres. Plus à l’est, en Perse, les agissements des militaires ottomans et des agents locaux germaniques qui répandaient une propagande panislamique, exhortant le pays à prendre les armes aux côtés des Allemands, apparaissaient aux yeux des Britanniques comme menaçant leur domination sur l’Inde.

Ce n’était pas tout. Durant la plus grande partie de l’année 1915, les Allemands échafaudèrent des plans pour envoyer des émissaires à travers la Turquie et l’Arabie occidentale jusqu’à la mer Morte, et de là en Abyssinie, au Soudan et plus loin en Afrique. Ces agents avaient ordre de distribuer des armes aux musulmans et d’inciter à la guerre sainte contre les Britanniques. Mais la plupart de ces plans échouèrent. Ils reflétaient le souhait de Berlin de riposter à la pression intense déjà exercée par les Britanniques et les Français sur les possessions coloniales allemandes en Afrique. Car des troupes anglo-françaises s’étaient emparées du Togo et du Cameroun, et les forces britanniques et impériales avaient envahi le Sud-Ouest africain et l’Afrique orientale allemands.

Pendant ce temps, à Berlin aussi, l’inquiétude grandissait quant au cours que prenait la guerre au Proche-Orient. En particulier à propos du manque d’empressement des Ottomans arabes pour le djihad soutenu par les Allemands. De nombreux Turcs n’avaient pas, eux non plus, accueilli avec enthousiasme l’appel à la guerre sainte. Par conséquent, en avril, Oppenheim se rendit à Constantinople. Sa mission ultérieure en Turquie viserait essentiellement à réactiver ce que lui et d’autres dirigeants allemands considéraient comme des campagnes de propagande et de renseignement infructueuses auprès des Arabes et des autres musulmans.

À cet égard, la question la plus sérieuse pour les Allemands était la loyauté envers les Ottomans du chérif de la Mecque. À la fin avril, Oppenheim rencontra à deux reprises Fayçal, le fils du chérif. Les deux hommes conclurent un accord par lequel le chérif s’engageait à propager l’idéologie panislamique et à rendre compte au gouvernement ottoman de la situation politique en Arabie. Mais Oppenheim ignorait apparemment que peu de temps auparavant, Fayçal avait passé du temps en Syrie avec les nationalistes arabes anti-ottomans, évaluant leur force pour son père. Il était également venu en visite à Constantinople pour se plaindre d’un supposé complot pour renverser le chérif et sa famille et mettre fin à leur souveraineté sur le Hedjaz et ses lieux saints islamiques.

Outre sa rencontre avec Fayçal, Oppenheim élaborait des plans pour utiliser les Arabes mésopotamiens au service de la propagande. En Syrie et en Arabie du Nord, il établit dans de nombreuses villes et consulats allemands locaux un réseau étendu de centres de propagande. Au cours du mois de juin il achevait en Syrie la création d’une organisation secrète pour l’envoi de la propagande et d’autres informations en Égypte.

Au cours des quatre mois suivants, établissant son quartier général à Damas, il voyagea dans la campagne syrienne, dans la péninsule du Sinaï sous contrôle britannique, et vers le sud à proximité de Médine. Habillé comme un Bédouin, portant une réserve considérable d’argent et accompagné par Prüfer, il s’arrêtait dans les villes, les villages et les oasis, prêchant un panislamisme enflammé et la haine des chrétiens, surtout des Britanniques. Mais ses exhortations impressionnaient peu ses auditeurs arabes, pas plus que le fait qu’il avait été juif et qu’il représentait un État chrétien. Aussi ses activités furent-elles jaugées par des Ottomans attentifs et soupçonneux qui désapprouvaient sa mission.

En effet, la tension et les désaccords entre les Allemands et les Ottomans à presque tous les niveaux politiques et militaires allaient croissant. En Syrie, Djemal Pacha, le gouverneur Jeune-Turc de la province et commandant de la 4e armée ottomane rendit plus dure la tâche d’Oppenheim de sauver le projet de djihad. Djemal commença à soupçonner un complot anti-turc parmi les nationalistes arabes locaux. Il changea de politique à leur égard, passant de la conciliation et de l’apaisement à la répression, exécutant onze nationalistes et en condamnant à mort par contumace quarante-cinq autres. Il fit retirer les unités militaires arabes de la Syrie et les remplaça par des forces turques.

Les Britanniques, pour leur part, avaient reçu des rapports selon lesquels il y avait de la friction entre leurs ennemis. En mai 1915, Le Caire était au courant de la mission d’Oppenheim, mais la Résidence ne savait rien de ses rencontres avec Fayçal. Une autre information arriva au Caire : Oppenheim et les officiers consulaires à Haifa, Alep et dans la Syrie du nord encourageaient le massacre des Arméniens par les Ottomans.

Le sens de la crise

À l’automne 1915, la certitude que la guerre au Proche-Orient avait atteint un point critique était largement répandue parmi les dirigeants britanniques. Les forces britanniques subissaient une défaite militaire continue à Gallipoli et en Mésopotamie, et les crises politiques sur les frontières de l’Égypte et de l’Inde, inspirées par des agents allemands et turcs, avaient atteint leur apogée. Une attaque en novembre par le cheikh Al-Senoussi sur les avant-postes britanniques dans l’ouest de l’Égypte coïncida avec l’arrivée des fonctionnaires allemands en Afghanistan et le summum de l’agitation germano-ottomane anti-britannique en Perse.

Un sentiment d’urgence tenaillait les principaux responsables au Caire et à Londres, confortés dans l’idée que l’empire ottoman ne devait pas survivre. Mais en 1915 le Royaume-Uni avait l’obligation de prendre en compte les intérêts de ses alliés européens au Proche-Orient au même titre que les siens. En mars, Londres et Paris avaient conclu l’accord de Constantinople avec la Russie ; il promettait les détroits de la mer Noire et la capitale turque aux Russes dans l’éventualité d’une victoire alliée. Mais l’étape cruciale fut l’œuvre du gouvernement britannique par l’intermédiaire de Sir Henry McMahon, haut commissaire en Égypte, qui accéda en octobre à la demande du chérif de la Mecque que le Royaume-Uni soutienne la lutte pour l’indépendance arabe en Arabie, Mésopotamie et dans la plus grande partie de la Syrie.

Selon les termes de l’accord et après de nombreux échanges de messages, Le Caire et Londres encouragèrent Hussein à susciter une révolte contre les Turcs, ce que Kitchener et le fils du chérif, Abdullah, avaient discuté à l’automne 1914. Hussein, dont la position dans le monde musulman comme gardien des lieux saints était unique et l’indépendance relative, n’était pas seulement la bonne personne pour diriger une rebellion arabe ; il était aussi le seul à pouvoir contrer les effets de l’appel au djihad du sultan-calife.

Au Caire, la peur d’un djihad panislamique anti-britannique courant de la Libye à l’Afghanistan -– et peut-être même à l’Inde -– avait atteint des proportions quasi épiques. Le 24 octobre, McMahon, considérant que les activités allemandes parmi les musulmans étaient d’une extrême gravité, envoya un avertissement au ministre des affaires étrangères, Sir Edward Grey, le jour même où il adressait son message crucial au chérif de la Mecque. « Des responsables allemands et des personnes privées, disait-il, ont dans de nombreux cas relayé le prêche du djihad et activement promu un esprit anti-chrétien parmi les musulmans. » Et il ajoutait que des agents allemands en Syrie, Mésopotamie et Libye avaient donné l’impression que l’empereur germanique s’était converti à l’islam.

Mais aux yeux des Britanniques, l’indice le plus clair de cette menace du panislamisme était la présence continue d’Oppenheim en Turquie. Les activités germaniques fournissaient au Caire des raisons supplémentaires de penser que le Royaume-Uni devait conclure une alliance avec les Arabes. Oppenheim attirait plus particulièrement l’attention de Sir Mark Sykes, un personnage-clé du Bureau de la guerre pour le Proche-Orient de Kitchener en charge du Proche-Orient. En juin 1915, Sykes avait quitté Londres pour une mission d’enquête au Proche-Orient et en Inde. Cependant, parce qu’il n’avait pas une connaissance approfondie de la plus grande partie de la région, lors d’un voyage à travers les Balkans il avait déjà absorbé une bonne part de l’hystérie de la guerre résultant d’informations parfois erronées sur Oppenheim.

Une fois en Égypte, Sykes envoya à Londres plus d’informations sur Oppenheim, provenant vraisemblablement non pas des services de renseignement, mais de ce qu’il avait entendu dire de source russe. Il fit d’Oppenheim un personnage plus grand que nature, le décrivant comme « un juif d’une grande richesse » et « l’ami personnel de l’empereur germanique ». Il déclara que les Allemands menaient « une violente guerre de religion contre la Grande-Bretagne » et insista à tort sur le fait qu’Oppenheim avait dirigé les opérations pour la Perse et l’Afghanistan. Il concluait son rapport en déclarant que les Allemands « [incitaient au massacre des Arméniens en Turquie et [faisaient] le maximum pour que nos compatriotes isolés soient assassinés en Perse. »

Il est difficile de savoir si la vision qu’avait Sykes de l’importance de l’origine juive d’Oppenheim a été renforcée par une même conception erronée d’autres dirigeants britanniques au Caire. Gilbert Clayton, le directeur du renseignement à la Résidence, et Sir Reginald Wingate, sirdar de l’armée égyptienne et gouverneur général du Soudan, pensaient qu’un groupe de juifs pro-allemands contrôlait le gouvernement ottoman.

Mais c’était surtout Sykes qui craignait la menace du panislamisme qu’Oppenheim représentait. Ce que l’on sait est que, au moment où Sykes est arrivé au Proche-Orient durant l’été, des contacts secrets se sont intensifiés entre Clayton, Sir Ronald Storrs, alors secrétaire oriental à la résidence du Caire, d’autres officiels et des nationalistes arabes partisans de l’indépendance. En outre, McMahon continuait à échanger des messages avec le chérif à propos de ces derniers et du début de la révolte arabe.

En octobre et novembre, Le Caire reçut des rapports sur la présence d’Oppenheim dans la péninsule du Sinai et le Hedjaz. L’information exacerba la panique parmi les Britanniques quant au fait qu’Oppenheim pourrait menacer la relation établie avec le chérif. L’Allemand était parvenu à quelques kilomètres de Médine et de certains des lieux les plus saints de l’islam avant qu’Hussein ne le force à partir. La nouvelle parvint aux Britanniques par l’intermédiaire d’Abdullah. Clayton, le chef du renseignement au Caire, raconta l’incident le 12 novembre à Londres. Il interprétait le message d’Abdullah à propos de l’expulsion d’Oppenheim de Médine comme l’expression de l’intention des Arabes d’entamer les hostilités contre les Turcs.

À la fin de 1915, l’activité panislamiste d’Oppenheim fournit aux responsables du Caire un argument supplémentaire pour les aider à persuader le gouvernement de Londres — malgré les objections du gouvernement de l’Inde en particulier, et aussi de quelques membres du Foreign Office et du ministère de la guerre — de s’engager auprès du chérif de la Mecque. La politique arabe du Caire, aux dires de Sir Reginald Wingate, le gouverneur général du Soudan, était dictée par la situation en Europe et par le succès des Empires centraux contre la Russie, qui avait bouleversé les plans des Alliés dans les Balkans et influencé le chérif.

De la correspondance entre McMahon et le chérif était sorti un projet d’accord sur le territoire qui devait être celui du futur État arabe indépendant, à l’exception de certaines zones vaguement délimitées en Syrie où les intérêts Français étaient impliqués. Le Royaume-Uni promit aussi de livrer des armes à Hussein au début de 1916, dans l’idée que ce dernier lancerait une insurrection arabe. Ces événements incitèrent Sykes et les responsables du Caire à créer une agence spéciale pour les affaires arabes, le Bureau arabe, au sein du service de renseignement local. De son côté, le gouvernement britannique mit au point un traité avec Ibn Saoud, principal chef arabe dans l’est et le centre de l’Arabie.

Un ensemble de facteurs semblait confirmer, aux yeux des dirigeants britanniques, le bien-fondé de leur politique de plus en plus pro-arabe. Parmi ces facteurs, des rapports confirmaient que les Turcs avaient réalisé qu’ils avaient un sérieux problème avec le chérif et qu’ils avaient l’intention de le ménager. À la mi-décembre, Sykes retourna à Londres, où des décisions majeures se prenaient concernant la stratégie de guerre. Le gouvernement avait entamé des négociations avec la France sur la base des revendications de celle-ci concernant la Syrie et la Palestine. Sykes avait alors à l’esprit les dispositions qu’il devait mettre en œuvre en mai 1916 dans le fameux et controversé accord Sykes-Picot avec la France. Pour cet accord, ignoré du chérif jusqu’au mois de novembre 1917 – ils furent révéla par les bolcheviks après leur prise du pouvoir –, Sykes avait négocié en secret avec les Français en vue de la future création (après la guerre) d’une « Grande Arabie » pour les Arabes et Hussein, mais excluant la partie syrienne sous contrôle français, les Britanniques pour leur part recevant la Mésopotamie. La Palestine devenait une zone internationale.

Sykes revint à Londres en héros. Il plaida au plus haut niveau du gouvernement pour la conclusion de l’alliance avec le chérif de la Mecque. Il avertit que les Turcs pouvaient tuer le chérif et le remplacer par leur propre candidat au poste de gardien des lieux saints. Ce qui se finirait, affirma-t-il, par un « djihad réel » menaçant le pouvoir britannique non seulement en Mésopotamie mais également en Égypte, en Perse, en Afghanistan, en Inde et au Soudan.

Ironiquement, en décembre 1915, la crise que Sykes dépeignait si passionnément à Londres — une crise causée par les activités des ennemis panislamiques et par la défaite militaire dans les Dardanelles — s’était dénouée, du moins momentanément. Les forces britanniques dans l’ouest de l’Égypte avaient refoulé le soulèvement senoussi, et en Perse les Britanniques et les Russes avaient repris le contrôle de la situation. De plus, l’amir d’Afghanistan avait rejeté les efforts de la mission allemande à Kaboul qui avait pour tâche de le convaincre de déclarer la guerre aux Britanniques en Inde.

On ne sait pas très bien dans quelle mesure ces considérations ont influencé les changements majeurs de stratégie militaire de Londres à la fin de l’année. Des changements qui ont abouti au transfert de très nombreuses troupes de l’Égypte à la France. En tout cas, le premier ministre Herbert Henry Asquith nomma William Robertson à la tête de l’état-major général de l’empire britannique. Robertson, un « Occidental » qui croyait que l’armée devait se concentrer sur le principal théâtre de guerre en France, qualifia de « mineurs » les événements politiques et militaires au Proche-Orient, indignes selon lui d’opérations plus importantes. Il ne tarda pas à remplacer l’« oriental » Kitchener comme conseiller militaire en chef du cabinet britannique. Robertson, à qui le grand nombre de troupes retenues au Porche-Orient déplaisait, ordonna à Maxwell de « récupérer le plus possible d’hommes, de chevaux et de fusils pour le front occidental ». Des quatorze divisions alors en Égypte, neuf furent envoyées en France avant le début de la bataille de la Somme le 1er juillet 1916. En Égypte et en Mésopotamie, Robertson commanda à ses officiers de suivre une ligne défensive.

1916-1918 : la révolte arabe

Autre fait du destin, durant les premières semaines de 1916, des nouvelles du Proche-Orient profondément décourageantes arrivèrent à Londres. Les dernières forces britanniques s’étaient retirées de Gallipoli le 8 janvier. En Mésopotamie, quatre-vingt mille Turcs de la VIe armée commandée par un maréchal allemand assiégeaient à Kut-el-Amara un bien plus petit nombre d’Anglo-Indiens.

Pendant ce temps, en janvier et février, Londres continuait à renforcer son alliance avec les Arabes. Le chérif de la Mecque était personnellement mal à l’aise avec ces négociations et du fait des nouvelles de la Syrie où le gouverneur ottoman Djemal Pacha poursuivait sa campagne de terreur contre les nationalistes arabes. Il assura néanmoins les Britanniques de sa loyauté. Le Caire continuait à tout faire pour inciter Hussein à la révolte. Le chérif, pour sa part, négociait aussi avec les Turcs, mais ces derniers paraissaient peu soucieux de l’apaiser.

Le 18 février, le chérif fit part au Caire de sa satisfaction concernant l’accord auquel il était parvenu avec le Royaume-Uni. Il en profita pour avertir qu’une action allemande était imminente en Arabie et en Afrique de l’Est. Il informa McMahon du « voyage d’un groupe d’Allemands sur les côtes d’Afrique », à travers la mer Rouge. Il promit d’informer Londres de leur « arrivée ici » et de leur « destination ». Il tenait ses informations de son fils Fayçal qu’il avait envoyé à Damas pour dissiper les soupçons des Turcs.

Quand la mission allemande arriva en Syrie, Djemal Pacha la retarda jusqu’au 2 mai. On ne sait pas très bien si les Turcs suspectaient une révolte arabe et s’ils craignaient vraiment pour la sécurité des Allemands. Ce que l’on sait est que Djemal informa le chérif sur la mission germanique et demanda à Hussein d’assurer sa sécurité lors de son passage à travers le Hedjaz. La mission voyagea en train dans le désert du Hedjaz avec une unité de l’armée ottomane, mais lorsqu’elle parvint au point au-delà duquel aucun non-musulman n’était autorisé, elle quitta l’unité ottomane et se mit à longer la côte de la mer Rouge. Elle prévoyait de faire le lien avec les Ottomans beaucoup plus bas sur la côte et de continuer jusqu’au Yémen. De là elle comptait traverser la mer Rouge pour se rendre au Soudan puis en Égypte. Là, la mission avait l’intention de provoquer des révoltes contre les Britanniques avec l’objectif grandiose d’éliminer la pression sur les forces germaniques assiégées en Afrique de l’Est.

Mais le 5 juin, comme la mission avait atteint Yanbu, la révolte arabe éclata dans le Hedjaz. Les Allemands fuyèrent pour sauver leurs vies, jetant la majeure partie de leur équipement — y compris les armes légères — dans la mer. La moitié de la mission réussit à s’échapper, mais les autres moururent aux mains des attaquants bédouins. À l’évidence, l’inquiétude du chérif à propos de l’arrivée de l’expédition germano-turque l’avait décidé à proclamer l’insurrection plusieurs semaines avant la date prévue et avant même qu’il ait reçu les armes promises par les Britanniques depuis le début de l’année 1916.

Le soulèvement surprit les Turcs et les Allemands, malgré plusieurs signaux d’alerte à propos de la désaffection d’Hussein et de son amitié avec le Royaume-Uni. La tension augmenta entre les Allemands et les Turcs. Alors que les Ottomans minimisaient la rébellion arabe, cette dernière suscita une inquiétude immédiate parmi les responsables allemands. Le 4 août, une seconde attaque turque planifiée de longue date sur le canal de Suez fut finalement déclenchée. Mais à l’instar de la première attaque, celle-ci échoua lamentablement. Elle ne perturba pas la révolte arabe, pas plus qu’elle ne menaça l’extension par les Britanniques de leurs défenses militaires dans la péninsule du Sinaï et vers la Palestine.

Pendant la révolte arabe, le Royaume-Uni et la France ont fourni des armes et des conseillers -– desquels le plus célèbre fut l’archéologue-espion britannique T. E. Lawrence -– aux forces arabes. Quant à Paris, principale alliée du Londres, la révolte augmenta son activité au Proche-Orient, au grand dam des responsables britanniques déterminés à limiter l’influence de son alliée. La France a soutenu la révolte arabe pour plusieurs raisons. Politiquement, la propagation de la rébellion dans les populations de Syrie, Palestine et Arménie était susceptible de préparer le terrain pour une intervention française dans la région, en particulier en Syrie. Militairement, les Français espéraient que la révolte paralyserait les Ottomans. Ils misaient aussi sur le fait que l’affaire convaincrait une majorité de musulmans dans les colonies africaines de la France d’abandonner leur soutien aux Turcs en faveur de la France comme libératrice des sanctuaires de l’islam. Ils envoyèrent deux missions en septembre 1916, l’une à Jeddah et l’autre à la Mecque pour aider les opérations militaires d’Hussein et son approvisionnement en armes.

Malgré les avantages immédiats que le Royaume-Uni a retirés de la révolte, on ne doit pas surestimer son importance dans l’histoire générale de la première guerre mondiale. Bien qu’elle ait contribué en 1918 à précipiter la défaite militaire de la Turquie, particulièrement avec les opérations militaires arabes en Transjordanie de l’été et de l’automne, la rébellion, tout comme les autres campagnes au Proche-Orient, a été d’une importance relative en comparaison des énormes offensives de l’Allemagne et des Alliés en France. Le Royaume-Uni aurait battu les Turcs même sans la campagne arabe.

Mais l’inverse aurait-il pu se produire ? Le Royaume-Uni et ses alliés auraient-ils pu triompher si les Arabes avaient suivi les appels pressants du sultan-calife et engagé le djihad contre les Alliés ? La réponse ne peut être que pure conjecture ; néanmoins, et ainsi que cette étude l’a montré, les Britanniques craignaient le panislamisme avant et pendant la guerre et l’éventualité d’une guerre sainte dirigée contre eux. Ils ont encouragé la révolte arabe principalement parce qu’en 1915 et au début de 1916 ils s’inquiétaient de ce que les Turcs, assistés par une Allemagne puissante, étaient sur le point de soulever le monde musulman de l’Afrique du Nord à l’Afghanistan dans une insurrection fanatique contre eux. Déjà, avant la guerre, des visions du panislamisme fomentant des révoltes en Égypte, dans le golfe Persique et en Inde horrifiaient les dirigeants britanniques. Leur anxiété accrue par les défaites désastreuses dans les Dardanelles et en Mésopotamie a forcé Londres à maintenir près d’un demi-million de soldats dans le Proche-Orient durant toute la guerre. On ne peut que spéculer sur l’impact que de telles forces auraient pu avoir sur le cours des batailles en France.

Finalement, on peut dire que cette paranoia a contribué à l’élaboration de multiples accords secrets et autres promesses conclus par les Britanniques avec les Arabes, les Français et -– du fait de la Déclaration Balfour du 2 novembre 1917 -– les juifs. Ces décisions ont constitué la base de la colonisation d’après-guerre au Proche-Orient, formalisée par une série d’actions, d’accords signés et de documents datant principalement de 1921 et 1922. Les colonies controversées, contestées par de nombreuses voix arabes, ont dépecé l’empire ottoman, laissant une Turquie réduite à l’Anatolie.

À court terme, la paix signée, « the peace to end all peace »1 a aidé le Royaume-Uni à garder la mainmise sur l’Égypte et l’Inde, voire à étendre son empire. Il a reçu de la Société des nations (SDN) des mandats pour gouverner la Palestine, y compris la Transjordanie. Dans la partie palestinienne du mandat, Londres a promis aux juifs un « foyer national » ouvert de plein droit aux non-juifs. Et a établi par ailleurs un protectorat sur l’Irak (la Mésopotamie). Dans le nord et l’est de l’Arabie, Ibn Saoud a pu gouverner avec un pouvoir renforcé par la guerre. La SDN a accordé à la France un mandat sur la Syrie et le Liban. Les Arabes ont quant à eux été profondément déçus par ce découpage colonial. Ils avaient contribué de façon substantielle au triomphe des Alliés sur les Turcs, et le chérif avait reçu la promesse — désormais dénoncée — d’un grand État arabe indépendant et d’une souveraineté territoriale. Mais très peu de gens, en ce temps-là, ont pris la pleine mesure des graves problèmes qu’allaient générer la guerre et la paix d’après-guerre au Proche-Orient pour le Royaume-Uni et pour le monde.

1Titre d’un livre de l’historien David Fromkin, paru en 1989.

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