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Trump à Riyad

L'image montre un homme souriant, probablement un dirigeant, qui reçoit des fleurs à son arrivée. Il est entouré de plusieurs personnes portant des vêtements traditionnels, dont certains sont en tenue arabique. L'environnement semble être un aéroport, avec un paysage désertique en arrière-plan. Les personnes autour de lui semblent être accueillantes et amicales.
Donald Trump accueilli avec des fleurs à son arrivée à l’aéroport de Riyad, 20 mai 2017.

Un discours très probablement opportuniste, mais en aucun cas offensif ? Assurément. Un discours polémique ou haineux ? Pas vraiment ! Un discours de conciliation, après les années Obama ? Sans aucun doute. Un discours sur l’islam comme religion ? Aucunement, mais un discours d’empathie envers les pays musulmans et arabes à qui Donald Trump a demandé de chasser les « terroristes » de chez eux. Anti-iranien alors ? Certes. Et il dénonce l’Iran chiite accusé de vouloir déstabiliser le Proche-Orient, et de répandre le terrorisme. Il a même appelé de ses vœux le moment où le peuple iranien disposerait d’un gouvernement juste et vertueux, comme celui de l’Arabie saoudite sans doute. Il a ainsi répondu au souhait de la majorité des chefs d’État présents, même si certains, comme Oman ou le Pakistan refusent de stigmatiser Téhéran. Enfin, il a mis dans le même sac des organisations « terroristes », Al-Qaida et le Hamas, l’organisation de l’État islamique (OEI) et le Hezbollah.

Telles paraissent les grandes lignes énoncées le dimanche 21 mai 2017 par le président américain Donald Trump à l’occasion de son premier déplacement à l’étranger, réservé au royaume wahhabite, avant Israël et la Palestine. Un discours auquel l’actuel occupant de la Maison Blanche — empêtré jusqu’au cou dans un imbroglio politico-judiciaire dans son pays — n’a pas habitué son public, invariablement décontenancé par ses propos. Quelle mesure, en effet, dans le ton utilisé par ce chef d’État décidément imprévisible et qui n’a pas ménagé ses diatribes contre l’islam durant sa campagne présidentielle ! « Je pense que l’islam nous déteste. Il y a énormément de haine », déclarait alors le candidat, allant jusqu’à vouloir interdire l’entrée des États-Unis à tous les musulmans « le temps de comprendre ce problème ». Dimanche, presque avec candeur, Trump a reconnu que plus de 95 % des victimes de l’OEI et d’Al-Qaida sont des musulmans. « Les populations innocentes des pays musulmans, arabes et proche-orientaux sont elles-mêmes les principales victimes. » Quel aveu !

Des expressions belliqueuses comme « terrorisme islamiste radical », propres à heurter les Arabes — et contre lesquelles son prédécesseur Barack Obama avait mis en garde — ont disparu de son vocabulaire. On avait beau chercher la faille ou la bourde sur l’islam, les paroles de Trump ont plutôt donné l’impression d’un président au langage « normal » et modéré, prononçant des phrases de bon sens, allant jusqu’à affirmer que ce n’était point le rôle des États-Unis de prodiguer des conseils à l’assemblée des dirigeants arabes (il a même vanté les merveilles de leurs pays, à l’instar des beautés de Louxor !) Et laissant aux oubliettes ses moqueries toutes fraîches dans les mémoires de l’Arabie saoudite, peu respectueuse envers les femmes.

Le discours de Trump a presque fait écho, du moins en apparence, à celui de Barack Obama au Caire en 2009, mais toute référence à une évolution démocratique de la région en était gommée, au nom du refus de l’ingérence et du rejet de tout modèle. Et le message du nouveau président a été : « Aidez-vous vous-mêmes à vous débarrasser du terrorisme ; c’est votre affaire » (« Chassez-les, chassez-les, chassez-les », a-t-il répété trois fois de suite). Vantant les bienfaits de la coopération plutôt qu’une implication directe des États-Unis, il s’est montré un véritable homme d’affaires, prêt à mettre tout son arsenal militaire à la disposition de ses alliés pour chasser les « terroristes » : les ventes d’armes toujours, et toujours plus. Pour donner le ton, la Maison Blanche a annoncé samedi des contrats de vente d’armement d’une valeur de 110 milliards de dollars à l’Arabie saoudite — dont on se demande comme elle pourra les payer, compte tenu de la crise financière qu’elle traverse et du coût prohibitif de la guerre qu’elle mène au Yémen et que Trump a saluée. Voici donc une première bonne nouvelle pour l’économie américaine.

Du coup, exit les droits humains (les vrais alliés de Trump ne sont-ils pas la Turquie de Recep Tayyip Erdogan, l’Égypte du maréchal Abdel Fattah Al-Sissi, et autres potentats du monde arabo-musulman ?) au profit d’un discours empreint de realpolitik, mais compatible avec la susceptibilité de certains pays arabes  Nous ne sommes pas ici pour donner des leçons. ») Tout ce « show » devant les représentants d’environ 1,5 milliard de musulmans n’est-il donc qu’hypocrisie déguisée en belles paroles ? La question se pose d’autant plus que le terreau des groupes extrémistes qui recourent à la violence se trouve surtout dans les pays sunnites et souvent alimenté par des fonds qui en proviennent.

Une fois de plus, l’Iran a été stigmatisé (longuement) par le roi Salman et par Trump, en parfait accord (avec Israël) sur l’ennemi principal. Le soutien iranien à Bachar Al-Assad a été pointé par Trump, rendant le régime syrien responsable de « crimes innommables ». Étrange coïncidence, ce sommet s’est tenu alors que l’Iran célébrait la large victoire du conservateur modéré Hassan Rohani contre le clan du clergé anti-américain. Sur un ton ironique, Téhéran n’a pas tardé à réagir en suggérant que le président américain ne voulait que « pomper » l’argent du roi Salman.

En attendant de tirer les conséquences à long terme de ce sommet, et aussi de la visite de Trump en Israël et en Palestine, un message émerge qui semble dire : « Chassez les terroristes… et faisons des affaires. »

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