Qui dirige l’Iran ?

Contrairement aux idées reçues qui résument parfois le pays à un « régime des mollahs », le système institutionnel de l’Iran est complexe. Comme partout ailleurs dans le monde, plusieurs structures de pouvoir collaborent ou entrent en concurrence les unes avec les autres.

Une théocratie ?

Plusieurs pôles de pouvoir coexistent en République islamique d’Iran : les pouvoirs exécutif et législatif sont ainsi partagés entre le Parlement, le président et le Guide de la Révolution. Parmi les trois, c’est toutefois bien ce dernier, plus couramment appelé « Guide suprême » en France, qui est la clef de voûte du régime. En plus d’être le chef des armées, il est la véritable autorité décisionnaire lorsque les intérêts fondamentaux de la nation sont en jeu (telle la politique nucléaire) et contrôle l’ensemble des autres organes. En effet, l’Iran est régi selon le principe du « gouvernement du docte » (velayat-e faqih en persan) : seuls les religieux ont la légitimité requise pour diriger le pays.

© Nicolas Lepoutre.

Pour autant, on ne peut considérer l’Iran comme une pure théocratie. En effet, toutes les institutions ne s’appuient pas sur une légitimité religieuse (en vert sur le schéma ci-dessus). Certaines, comme le président, détiennent plutôt une légitimité électorale (en bleu sur le schéma) ou combinent les deux, telle l’Assemblée des experts. Le suffrage universel joue donc un rôle important en Iran. En ce sens, l’article 1er de la Constitution iranienne de 1979 marque bien la dualité du régime puisque la forme de gouvernement du pays y est justifiée à la fois par une référence aux principes coraniques et par le résultat du référendum organisé en mars 1979, au lendemain de la révolution.

Des élections très contrôlées

Même s’il n’existe pas de partis politiques à proprement parler et que les différentes factions en compétition sont souvent peu lisibles pour les observateurs occidentaux, les élections législatives ou l’élection présidentielle iranienne voient s’affronter des candidats au programme varié (y compris au sein du groupe des « conservateurs » ou des « modérés »). Le pays peut ainsi connaître des formes d’alternance politique : à l’ultraconservateur Mahmoud Ahmadinejad succède par exemple le modéré Hassan Rohani comme président en 2013. La vie politique iranienne est encore renforcée par le fait que les différents pôles de pouvoir ne sont pas forcément alignés : le président modéré actuel doit ainsi composer avec un Parlement très largement dominé par les conservateurs depuis 2020.

Si le droit de vote des Iraniens et des Iraniennes n’est pas purement formel, le régime ne peut toutefois pas être qualifié de démocratique. Au-delà même du rôle du Guide de la révolution, il faut souligner que les élections ne sont pas libres. Les candidats sont en effet sélectionnés au préalable par le Conseil des gardiens de la constitution qui vérifie la conformité de toutes les candidatures (cf. schéma) : seuls des partisans du régime peuvent se présenter. Ainsi, 55 % des candidatures pour les élections législatives de 2020 ont-elles été disqualifiées, réduisant considérablement l’ouverture du jeu politique.

De surcroît, le résultat des élections ne semble pas toujours respecté, comme en témoignent en 2009 la réélection très contestée de Mahmoud Ahmadinejad, puis la violente répression du « mouvement vert » (nom donné aux manifestations contre la fraude électorale). La peur d’une militarisation du régime est encore renforcée par le poids majeur du corps des Gardiens de la Révolution islamique (aussi appelés pasdaran), armée d’élite du régime, dans le domaine militaire mais aussi politique et économique.

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