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Vers une nouvelle pop arabe ?

Le retour de l’industrie musicale dans le monde arabe depuis 2018 n’est pas de tout repos ni couronné de succès pour le moment. Il s’est aussi accompagné de la réapparition d’acteurs historiques dans la région, comme la compagnie saoudienne Rotana, autant qu’il a confirmé la domination de YouTube. Comment le monde arabe va-t-il concrètement dépasser un format inventé dans les années 1990, l’ère du clip et des stars comme Amr Diab ? En finir avec le piratage des années 2000 ? Quelles sont les nouvelles « musiques urbaines », biberonnées au streaming, en train d’éclore dans ce contexte ?

L'image montre un espace de bureau moderne avec de grandes fenêtres offrant une vue sur l'extérieur. Les murs sont décorés de peintures murales colorées représentant des visages stylisés. Le mobilier est minimaliste et fonctionnel, avec des tables de travail et des chaises ergonomiques. L'éclairage est tamisé, créant une ambiance chaleureuse malgré le design contemporain. On peut également voir des ordinateurs sur les bureaux, indiquant que l'espace est utilisé pour le travail.
Les bureaux d’Anghami à Beyrouth
anghami.com

En fait de marché aux contours clairs dans le monde arabe, à l’ère du streaming qui vient de s’ouvrir, ce qui se dessine ressemble sous certains aspects à un marché de dupes, tissé de coups de bluff et de coups de sonde. Tous les acteurs parient sur l’émergence d’un marché arabe intérieur sans savoir encore lequel, tandis que certains artistes arabes espèrent la diffusion mondiale de leurs productions en se berçant d’illusions et en tâtonnant sur les nouvelles tendances musicales. Pour Dolly Makhoul, à la tête d’une des rares équipes dédiées à la région MENA, chez Believe : « L’enjeu actuel est d’éduquer le marché. Y compris les artistes… en les aidant à mieux gérer leurs attentes et bien tracer leurs chemins afin atteindre leurs objectifs. »

Rotana ou l’arrivée d’un dinosaure

Paradoxalement, l’arrivée d’acteurs mondiaux dans le marché arabe a remis en selle quelques dinosaures, à commencer par l’emblématique label Rotana, à nouveau en piste quand beaucoup prédisaient sa chute il y a deux ans. Le mastodonte saoudien, qui a régné sans partage sur le marché arabe pendant vingt ans est revenu sur le devant de la scène de manière inespérée. « Rotana, ça n’est pas une compagnie ordinaire. Il n’y a pas une compagnie, nulle part, qui a pu signer toutes les stars d’une région. Leur monopole musical c’est du jamais vu », souligne un connaisseur du marché, qui préfère ne pas être cité. Divine surprise pour une compagnie qui avait raté le tournant numérique, après avoir marqué l’ère de la télévision satellite dans les années 1990-2000.

Taille critique, profondeur historique suffisante et catalogue reconnu : Rotana était l’un des seuls acteurs crédibles pour un deal à l’international avec Deezer. C’est aussi l’un des acteurs clé d’une autre opportunité, plus politique, l’ouverture du marché de la musique et des concerts en Arabie saoudite : « elle a mis Rotana dans la position d’intermédiaire pour permettre aux promoteurs étrangers d’approcher ce marché », selon une spécialiste qui travaille depuis Dubaï sur ces questions.

Lâché par nombre de ses artistes dans la décennie 2010, faute d’argent, Rotana a pu les attirer à nouveau par le retour de juteux contrats, faisant miroiter une promesse à des stars vieillissantes des « streams » à l’échelle mondiale. Samira Saïd, active depuis les années 1980, membre de l’écurie Rotana et voix du tube Youm Wara Youm formulait tout haut en plein milieu de la soirée de lancement du deal Deezer/Rotana en octobre 2018, à Beyrouth : « Mon rêve depuis vingt ans c’est qu’on touche au monde entier […] La chanson indienne est connue dans tout le monde, alors que la chanson arabe est encore locale ».

Sur ce point pourtant, d’autres acteurs de ce marché sont catégoriques, « les gens qui écoutent Samira Saïd ne vont pas la streamer » pour l’un. Les utilisateurs privilégiés du streaming n’y sont pas attentifs : « Les 18-19 ans ne sont pas intéressés par Rotana », tranche un autre. Encore moins les oreilles étrangères. Cette perte de vitesse de Rotana, la bonne santé d’Anghami aujourd’hui le prouve, en creux. Malgré le retrait de tout le catalogue de Rotana de la plateforme, pour aller exclusivement sur Deezer, celle-ci ne s’est pas effondrée.

YouTube l’indétronable

Le grand retour de l’industrie musicale dans le monde arabe bute ainsi sur des acteurs et des habitudes bien établies, que les nouveaux venus découvrent parfois après avoir cru à un eldorado où tout était possible. La préséance de YouTube par exemple reste remarquable, d’abord parce que c’est l’espace où des formats très populaires se déploient, par essence entre vidéo et musique : le clip musical arabe, forme historique des années 1990, toujours vivace ; les extraits des émissions musicales (X-factor, Arab Idol) aux audiences régionales ; les chaînes de « youtubeurs » ou d’émissions TV, où certains chantent seulement le temps de deux ou trois titres (pas loin des vidéos comiques). S’y ajoutent aussi des publicités musicales, comme celle de Vodafone en Égypte, en 2018, qui cumule pas moins de… 81 millions de vues.

Pub Vodafone — YouTube

Ce type de contenu a parfois une existence au-delà de la pub elle-même, comme chez l’égyptien Mohamed Ramadan, d’abord chanteur le temps d’une publicité, qui a fini par multiplier les titres au plus de 100 millions de vues. Mais il pose un problème crucial à la base, révélateur au passage de liens entre business et musique incomparables à ce qu’on peut observer en Europe ou en Amérique du Nord : cette production de chansons-pubs ne rentre pas dans les cases du streaming et la logique des publicités entre les chansons. Autrement dit, difficile de déplacer hors de YouTube et vers d’autres plateformes certains produits culturels hybrides, sans vocation à être vendus comme chansons.

Mohamed Ramadan/محمد رمضان - نمبر وان

Ensuite YouTube, présent depuis plus de dix ans dans la région, est de très loin en avance sur le volume d’écoutes. Un tube pop moyen récent, Fraise, de Hazem Al-Sadeer, est quarante fois plus écouté sur YouTube que sur Spotify sur la même période. Et le nombre d’écoutes sur YouTube est le seul « top » reconnu : face à la fronde des artistes Rotana qui s’étaient élevés contre le retrait de leurs chansons d’Anghami, le compromis a été de laisser ces mêmes chansons sur YouTube, avec leur cumul de vues depuis des années.

Hazem Al Sadeer, Fraise — YouTube

Dans le même ordre d’idée, des musiques plus indépendantes, comme les chants de supporters (devenu un style musical en soi, qui s’enregistre en studio et s’écoute hors du stade), ou bien l’électro égyptienne moharagan ont élu domicile sur YouTube depuis longtemps. Ainsi pour Ghassan Chartouni, « YouTube n’est pas un compétiteur, c’est un acteur clé, comme un fournisseur de services, avec lequel tout le monde travaille et qui travaille avec tout le monde ».

Concerts, streaming : quels revenus ?

Cette centralité de YouTube n’est pourtant pas tout à fait sans contrepartie : « C’est la plus grande plateforme de streaming au monde, mais elle n’a pas été pensée pour ça, et c’est aussi celle qui rapporte le moins aux artistes proportionnellement », note Eddy Maroun. Une écoute sur YouTube rapporte en effet cinquante fois moins à l’artiste que sur une plateforme comme Deezer. Ces revenus, les artistes d’aujourd’hui n’y ont pas accordé beaucoup d’importance jusqu’ici : vendre des titres est une question marginale, à cause du piratage. Seuls les concerts comptent. Les DJ de mariage du moharagan autant que les mégastars Rotana de la pop léchée (avec leurs cachets aux dizaines de milliers de dollars dans le Golfe), gagnent leur vie de cette façon. Là encore, la région est allée très loin, et bien avant l’industrie musicale mondiale des années 2010, dans la centralité du concert comme source de revenus majeure pour l’artiste... Presque jusqu’à en faire la seule.

Pourtant, Habib Achour de la Société des auteurs, compositeurs et interprètes de musique (Sacem) française le souligne, les écoutes en digital et les droits d’auteurs liés sont importants, et partis pour le devenir encore plus : « Même si ça ne représente qu’une centaine d’euros de droits parfois, il y a déjà un intérêt pour les artistes à s’y intéresser, et à l’avenir ça va devenir beaucoup plus important ». À plus grande échelle, pour convaincre les gouvernements de s’intéresser à ces questions et créer des autorités de gestion et de collecte des droits, d’autres chiffres plus massifs pèsent : « l’industrie de la culture c’est 44,6 milliards d’euros en France en 2018, presque autant que l’industrie de l’automobile ». Pas impossible sur ce point que le Covid-19 oblige justement à un tournant plus rapide que prévu, faute de concerts possibles.

L’auditeur en question

Le monde arabe a ainsi déjà largement expérimenté trois aspects censés représenter le « renouveau de l’industrie » : le modèle de l’artiste-entrepreneur, celui des revenus principalement issus des concerts, et l’intégration avancée entre différentes formes de business et la musique pop. En revenir n’est pas évident pour les artistes, et pas plus pour les auditeurs.

En 2018, un cadre de Deezer se voulait optimiste en avançant l’idée, centrale dans l’histoire du streaming, que « les gens vont vers le piratage si c’est compliqué ou trop cher. À partir du moment où l’on propose une bonne expérience utilisateur, ils restent ». Or, l’expérience utilisateur n’est pas encore à la hauteur, la langue arabe et ses retranscriptions sont mal prises en charge sur Spotify et Deezer, tandis qu’Anghami a une interface vieillissante.

Les catalogues présentent aussi de larges trous, à cause de labels disparus et d’imbroglios d’ayant-droits à n’en plus finir. Par exemple, toute une partie du catalogue d’une absolue superstar, Fairouz, est absent des offres légales. Et le piratage n’est pas qu’une question d’« offre » plus avantageuse à un « moment t », c’est aussi une question de pratiques ancrées dans le temps long. YouTube comme le piratage est installé dans un quotidien. Encore aujourd’hui, à travers la région, des vendeurs de CDs g(r)avés de mp3 ont pignon sur rue, les mêmes sites de piratage sont encore actifs depuis quinze ans, et de nouvelles formes illicites comme le stream ripping (enregistrer en mp3 une vidéo) sont apparues.

En quête de la meilleure recette

Marshmello & Amr Diab, Bayen Habeit «  In Love  » (Lyric Video) | عمرو دياب Marshmello - باين حبيت— YouTube

Du Golfe au Maghreb, on attend donc de voir un monde s’effacer, et l’essor d’un équilibre nouveau entre support d’écoute, organisation globale de l’industrie (encore mouvante), types de revenus, et enfin nouveaux styles musicaux. Car la musique à venir est une des questions centrales.

La production musicale arabe semble être traversée depuis quelques années par la multiplication des coups de sonde, en attendant enfin la bonne recette du crossover, le tube mondial. « Il y a des tendances, on voit de plus en plus de collaborations, de plus en plus de hip-hop… », lâche Eddy Maroun, « et c’est quelque chose qu’on soutient, ça n’a rien de pro bono, c’est comme ça qu’on se développe ».

Acteur qui revendique de savoir « prendre le pouls » du marché, Anghami s’est essayé à produire des titres comme Bayen Habeit, (In Love), un duo entre Amr Diab et le DJ américain Marshmello. Plus gros tube de 2019 sur la plateforme, il n’a toutefois pas dépassé celle-ci, et compte seulement 10 millions de vues sur YouTube quand d’autres titres de la même année y atteignent la centaine de millions de vues. Une reprise de Diab (son hit historique Nour al Ein, rare hit arabe international de 1997) impliquant la star américaine French Montana n’a pas eu non plus un succès fracassant.

Wegz, Saleny | ويجز ساليني (Official music Video) — YouTube

Ratage plus franc enfin, ce rap régional, croisant plusieurs artistes hip-hop, mais avec une production datée de dix ans, Anghami Cypher. Une sortie à contretemps quand au même moment, par exemple en Égypte, Wegz et Marwan Pablo font de la trap modèle 2010, ou que les artistes de moharagan y cartonnent avec un son local hyper reconnaissable.

Parier sur les tubes futurs

La démarche d’Anghami n’est qu’un coup d’essai parmi d’autres, dans ses succès comme ses échecs. La compétition est largement lancée entre l’importation de sons internationaux, comme le fait la Marocaine Psychoqueen avec le son latino de Enta Habibi, ou surtout une nouvelle génération de rappeurs convertis à la trap. S’y ajoutent featurings et collaborations internationales entre artistes, comme celle à venir entre l’Égyptien Mohamed Ramadan et le français Maitre Gims. Enfin les chansons bilingues, comme chez la chanteuse marocaine Manal ou les Koweïtiens de Sons of Yusuf, se sont multipliées.

Manal - Slay x El GrandeToto (Official Music Video) — YouTube

Plantages retentissants et Frankenstein musicaux attestent d’un certain tâtonnement. Comme dans le cas de la chanteuse libanaise Elissa en 2019, avec un titre électro internationale et (au moins) un son de retard, ou du mix étrange de Flip and Daffy (duo entre le Bahreïn et le Koweït), en 2017. Dans ce titre au son électro arabe branché sur le couplet, le refrain style rnb du début des années 2000 arrive comme un cheveu sur la soupe.

Beaucoup, au lieu de forger un nouveau son, font l’inverse : « ils prennent le marché international et copient », tranche Ghassan Chartouni. Ce qui pourrait être le nouveau son global, successeur du reggaeton, est donc encore dans les limbes, mais plusieurs pionniers commencent à dépasser la simple démarche de copie : les vétérans palestiniens de Dam, la trap de Shabjeed (Palestine), celle de Issam (Maroc), quelques tubes moharagan pop friendly, ou enfin les tentatives de Majd el Aissa (Arabie saoudite).

Issam, Caviar — YouTube

Se joue dans ces titres prometteurs un mélange entre hip-hop et électro, « c’est ça qui a émergé depuis les révolutions arabes, et c’est ça qu’on voit énormément en Afrique aussi, cette nouvelle catégorie de musiques urbaines ». Pour Dolly Makhoul, de Believe, c’est en partie là où se joue le renouveau de la musique.

L’essor de ces scènes est justement à l’intersection de trois éléments plus structurels. L’essor du home studio et de musiques (électro et hip-hop justement) qui peuvent se satisfaire d’un ordinateur et sont parfois 100 % digitales, jusqu’à même permettre à des artistes de ne même pas envisager des concerts.

La montée en puissance, dans l’industrie musicale, d’acteurs justement familiers de ces styles de musiques comme du support numérique est aussi d’importance. Ces distributeurs (Believe, Idol, the Orchard, Qanawat, etc.) sont en train d’émerger à l’échelle mondiale comme une clé de cette nouvelle industrie musicale. Chargés de distribuer la musique en ligne quand les « labels » ne distribuaient encore que des disques physiques dans les années 2000, ils sont désormais amenés à les concurrencer, et même les remplacent. Ils deviennent, avec les services de streaming, les interlocuteurs privilégiés des artistes.

Enfin, ce retour de l’industrie musicale change la place d’autres acteurs, essentiels cette dernière décennie, que sont les divers festivals/expositions, comme Visa for Music (Maroc), Beirut and beyond (Liban), Al Balad (Jordanie), ou plus récemment Palestine Music Expo. Un réseau de scènes locales actif depuis des années dont les sons jusque-là « alternatifs » de l’électro et du hip-hop sont en train de devenir mainstream. « C’est un écosystème de la musique fondamental, que la Sacem fait en sorte d’aider depuis des années », souligne Habib Achour.

La pop arabe post-Rotana 

L’électro et le hip-hop arriveront-ils à influencer la pop arabe dominante, celle que Rotana a longtemps incarnée ? Musique qui justement circule entre les pays arabes, et non pas seulement vers ou depuis le marché international, écoutée par des millions de personnes dans la région à travers les émissions comme « Arab Idol », c’est la manne financière la plus alléchante.

Or la relève de la génération d’Amr Diab peine à émerger depuis un moment. « Pourquoi depuis quinze ans il n’y a pas eu une seule nouvelle star arabe féminine ? Il faut se poser la question », assène Ghassan Chartouni, dont le label compte comme tête de pont l’un des seuls « rescapés » des émissions télé, Nassif Zeytoun.

Que va devenir cette pop arabe, massivement écoutée sur YouTube, dont le format appartient à des styles musicaux par nature peu adaptés au streaming ? Elle a en effet des caractéristiques à contre-courant de la moyenne des tubes internationaux avec ses intros longues et lentes en forme de mawal, chansons qui dépassent souvent les cinq minutes, sonorités en mineur, rythmes ternaires ou complexes plutôt que binaires, BPM (beat par minute) plus lent, etc.

En Europe et en Amérique du Nord, le streaming a reconfiguré depuis dix ans le format de la pop internationale, et chacun a tiré musicalement les conséquences d’un nouveau modèle d’économie et d’écoute. Ainsi, un album de la star américaine Drake est plus court en 2016 qu’en 2010, compte plus de chansons, chacune moins longue et conçue pour éviter que l’auditeur zappe avant 30 secondes (le temps au bout duquel la chanson est comptabilisée et rémunérée). Une autre Américaine, Thierra Wack, est même allée jusqu’au bout de la logique avec un album de chansons d’une minute chacune, tandis que le champion français du rap Jul enchaîne les sorties pour avoir le plus de titres écoutés.

Le streaming à l’heure arabe patine encore, et difficile de savoir quelle influence il pourrait avoir. Mais il se situe d’emblée à contre-courant de ces stars à la production déclinante. De manière remarquable, les carrières des chanteur/ses de la génération Diab connaissent la même trajectoire : une Elissa ou une Haïfa Wehbé continuent à jouer la même partition de bimbo plus de vingt ans après le début de leur carrière, Amr Diab celui de séducteur, les uns et les autres avec le soutien actif de la chirurgie esthétique. Si ce type de carrière d’artiste qui ne change pas existe ailleurs dans le monde, Julio Iglesias en tête, elle reste une possibilité parmi d’autres quand dans le monde arabe, elle est presque la seule possible, à part l’oubli.

Auto-tune en embuscade

Musicalement, ces artistes restent sur un format 1990, une recette pop « Rotana » avec des morceaux accélérés, raccourcis, proche de la pop internationale à l’époque. Celle-ci a depuis radicalement évolué de son côté quand les albums de pop arabe actuels restent structurés sur ces codes et sonnent comme des versions remasterisées de vieilles recettes : celui de Shérine, Nassay, sorti en 2018, passe par exemple encore de ces chansons avec guitares espagnoles à la balade avec déluge de cordes, etc.

Shérine, Nassay | شيرين - نساي— YouTube

Certes, les rythmes du Golfe ont parfois remplacé ceux d’Égypte ou du Liban. L’égyptien, lingua franca des chansons pop arabes depuis cinquante ans laisse place à du dialecte (Saad Lamjarred, qui chante en marocain), et les sons électro pointent parfois. Des évolutions marginales toutefois quand au même moment cette pop a été hermétique ou presque à l’instrument roi des années 2010 à l’échelle mondiale qu’est l’auto-tune.

L’ère du streaming pourra-t-elle y changer quelque chose ? C’est là que se situe l’un des plus grands paris actuels, avec une prochaine génération de stars appelées à s’adapter avec le streaming et le digital comme format natif ; de nouveaux interlocuteurs au-delà des labels (les agrégateurs, les services de streaming) ; un nouveau rapport aux concerts et aux revenus ; et enfin des sons inédits en embuscade où une nouvelle génération de producteurs jouent désormais (presque) à armes égales sur le matériel et les logiciels, avec des artistes américains ou européens.

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