Égypte. Le gouvernement s’acharne contre la famille d’Alaa Abdel Fattah

Depuis septembre 2019, Alaa Abdel Fattah, icône du printemps égyptien de 2011 est de nouveau sous les verrous, après avoir purgé une peine de cinq ans d’emprisonnement. Sa famille qui se bat pour sa libération fait à son tour l’objet de la violente répression menée par le gouvernement d’Abdel Fattah Al-Sissi contre toute opposition politique.

Laila Soueif, la mère d’Alaa Abdel Fattah, et ses deux sœurs Sanaa et Mona, devant la prison où il est enfermé

Mardi 23 juin, Sanaa Seif a été enlevée en plein jour par les services de sécurité égyptiens alors qu’elle allait porter plainte contre l’attaque dont elle et sa sœur avaient été victimes la veille devant la prison de Tora. Quelques heures plus tard, elle était accusée par le procureur général de la Sûreté de l’État d’incitations à des actes terroristes, de diffusion de fausses informations et de mauvais usages des réseaux sociaux visant à diffuser des idées terroristes. Elle est détenue pour au moins quinze jours, mais personne ne sait où.

Cet épisode n’est que le dernier en date depuis l’arrestation d’Alaa Abdel Fattah, militant égyptien et une des figures de la révolution de 2011. Il est arrêté en 2014 et condamné à quinze ans de prison en première instance. La cour d’appel réduit sa peine à cinq ans d’emprisonnement. En mars 2019, il sort de prison, mais reste placé sous contrôle judiciaire. Le 29 septembre 2019, comme tous les soirs il se rend au poste de police de Dokki, mais il est retenu. Alaa Abdel Fattah est à nouveau emprisonné. En octobre 2019, Amnesty International informe qu’il a été torturé par des gardiens de la prison.

En mars 2020, Alaa Abdel Fattah est toujours détenu, dans l’attente de son procès. La pandémie de Covid-19 amène les autorités égyptiennes à interdire les visites des familles aux prisonniers. Plusieurs appels sont lancés pour demander la libération des prisonniers politiques, car les prisons sont surpeuplées et les détenus n’ont pas de protection sanitaire pour faire face au coronavirus. Privé de contacts, de nourriture, de médicaments, Alaa Abdel Fattah démarre une grève de la faim de 36 jours.

Sa mère, Laila Soueif, professeure de mathématiques à l’université du Caire, attend tous les jours devant la prison de Tora pour pouvoir donner des médicaments à son fils. Elle dort sur le trottoir pendant une semaine. Sa photo fait le tour du monde. Le 17 mai, Lina Attalah, rédactrice en chef du dernier média indépendant, Mada Masr, se rend sur place pour l’interviewer. La journaliste est arrêtée par la police alors qu’elle prenait des photos. Elle est libérée sous caution quelques heures plus tard. Lina Attalah et son équipe n’en sont pas à la première intimidation de ce genre.

Le combat de la famille d’Alaa Abdel Fattah se poursuit. L’audience du procès est encore une fois reportée. Lundi 22 juin 2020, Laila Soueif et ses filles Mona et Sanaa passent la nuit devant la prison, car elles attendent une lettre écrite d’Alaa qui puisse les rassurer. Elles sont attaquées dès l’aube par un groupe de femmes envoyées par les autorités qui les frappent avec des bâtons. Le lendemain elles se rendent au bureau du procureur général pour porter plainte. Sana Soueif, la cadette, n’en ressort pas et se retrouve en prison.

L’acharnement des autorités sur cette famille d’intellectuels et de militants atteint un degré rarement égalé. La situation en Égypte se détériore tous les jours. Plus personne dans le pays n’ose s’opposer aux dérives autoritaires du gouvernement d’Abdel Fatah Al-Sissi.

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