Maroc. Malgré le séisme, un hymne à la vie

Plus d’un an après le tremblement de terre qui a secoué l’ouest du Maroc, une partie des familles vivent encore sous des tentes, notamment dans les villages. C’est le cas de la plupart des habitants de Tizgui dans la province d’Al Haouz. Malgré la précarité, ils se sont organisés et entraidés — ce qui leur a permis de commencer à reconstruire, de préserver leurs traditions et leur mode de vie amazighs. La photographe Clémence Goubault les a suivis sur le long cours.

Situé au Maroc dans la province d’Al Haouz au bout d’une piste de 17 kilomètres, à 2 000 mètres d’altitude, le douar de Tizgui est totalement enclavé. Il abrite 1 380 villageois. La chute de rochers y est une menace constante qui pèse sur la sureté des habitations.

L'image présente un paysage montagneux majestueux, caractérisé par des collines et des montagnes aux teintes brunes et ocre. Au premier plan, on peut voir un village construit en pierre, avec des maisons aux toits plats, intégrées dans le relief naturel. Les maisons semblent presque se fondre dans le paysage environnant. En bas, on aperçoit une végétation clairsemée, suggérant une vallée ou une zone forestière. L'ensemble donne une impression de rusticité et d'harmonie avec la nature.
Le douar de Tizgui.
Toutes les photos sont de Clémence Goubault

Après le séisme de septembre 2023, la précarité reste omniprésente à Tizgui. Les villageois vivent au rythme des tentes qui se déchirent, des maladies et des chutes de pierre. En mars et avril dernier, ils ont dû faire face à une épidémie de rougeole et même un cas d’infection microbienne qui a coûté la vie à un nouveau-né.

L'image montre un campement composé de plusieurs tentes colorées, disposées de manière relativement désordonnée. On peut voir des arbres dénudés en arrière-plan, et la lumière du soleil perce à travers les branches, créant une atmosphère mélancolique. Des enfants sont présents dans la scène, dont certains semblent s'occuper de tâches quotidiennes. De la fumée s'échappe d'un feu improvisé, suggérant que les habitants préparent de la nourriture ou se réchauffent. L'environnement semble rural et un peu désolé, témoignant d'une situation de précarité.
Le village de tentes se tient près de la rivière. Il s’agit d’une des rares surfaces planes.
La durée de vie des tentes est en moyenne de deux mois. Elles se déchirent au gré des intempéries et ont été changées cinq fois depuis le séisme.
L'image montre une mère assise avec quatre enfants dans une pièce décorée de manière traditionnelle. La mère porte un vêtement coloré et un foulard, tandis que les enfants, d'âges variés, sont assis autour d'elle. L'un des enfants est plus jeune et semble dans les bras d'un autre enfant. L'arrière-plan est orné de tissus aux motifs riches, et il y a une lumière douce qui entre par la fenêtre, créant une atmosphère chaleureuse et conviviale.
Yemna Ait Youssef et ses enfants.
La famille vit sous la tente en continu depuis le séisme.
Leur maison devra être reconstruite à l’écart des ruines de leur maison actuelle, à cause de la chute de rochers.

Face au cycle des naissances et des décès, au stress de la vie sous les tentes, les femmes s’entraident. Toutes ont prêté assistance aux femmes âgées (des tâches ménagères au soutien psychologique), aux femmes endeuillées et aux jeunes mères avec leur nourrisson.

L'image montre un groupe de femmes assises ensemble dans un paysage montagneux. Elles semblent discuter tout en tenant des enfants dans leurs bras. La lumière du soleil brille, créant une atmosphère chaleureuse. Les femmes portent des vêtements traditionnels colorés, et le décor est naturel, avec des collines en arrière-plan. L'ambiance semble intime et paisible, suggérant un moment de partage et de connexion entre elles.
Fatima Adghough (milieu), sa sœur Habiba Adghough ainsi qu’une amie, sur le toit de la maison.
Les deux femmes aident Fatima quelques jours avant son accouchement.
L'image montre une femme habillée d'un manteau jaune et d'une jupe rose, exprimant une attitude de fatigue ou de tristesse. Elle est penchée sur un lit à barreaux en bois, avec un coussin dessus. La pièce est peinte en bleu, mais on peut voir des fissures sur le mur. L'atmosphère semble réfléchissante et émotive, suggérant un moment de contemplation ou de désespoir.
Fatima Adghough la veille de son accouchement à la «  Maison des Mères  » à Asni.
Le dispensaire accueille gratuitement les femmes des villages isolés quelques jours avant et après l’accouchement.
L'image montre un groupe de femmes en marche sur un chemin de montagne. La femme au premier plan tient une couverture colorée et semble résolue. Les autres femmes, un peu plus en arrière, portent des vêtements traditionnels et avancent ensemble. En arrière-plan, on aperçoit des montagnes et des arbres dépouillés, suggérant un environnement rural. Cette scène évoque une atmosphère de communauté et de solidarité.
Fatima Adghough rentre chez elle soutenue par des villageoises. Rakkouche Id Jama (premier plan) s’occupe des mères et des nourrissons du village.

Le village compte 243 enfants, et l’école reste un défi pour la plupart d’entre eux. Leur scolarité est assurée entre 6 et 12 ans par cinq enseignants, en complément de l’éducation coranique régie par l’imam du village. Seule une infime minorité d’enfants (six) sont allées au collège à Marrakech lors de la dernière année scolaire. Sur les onze qui devaient y partir à cette rentrée, cinq ont dû rester auprès de leurs proches.

L'image montre un homme assis, en train d'écrire sur un support en bois, avec un crayon à la main. Autour de lui, plusieurs jeunes filles l'observent attentivement, certaines portant des foulards. L'environnement semble être une pièce ou un espace informel, peut-être une tente, avec des motifs colorés ou traditionnels. L'atmosphère est concentrée et engageante, suggérant un moment d'apprentissage ou d'enseignement.
Des enfants à la mosquée récitent le Coran auprès de Rachid Oubriek, l’Imam du village.
L'image montre deux jeunes filles se tenant côte à côte dans un intérieur rustique. Elles portent des robes simples aux teintes douces, et leur expression semble contemplative. L'ambiance de la scène est sombre, avec des murs en pierre et des éléments naturels tels que de l'herbe au sol. Une lumière douce pénètre par une fenêtre, créant un contraste avec l'ombre de la pièce. L'ensemble dégage une atmosphère de simplicité et d'authenticité.
Hajar (11 ans) et Laila (8 ans) Id Masaoud dans l’écurie de leur foyer. Après avoir suivi de près la mise-bas d’un veau, elles veillent sur le bien-être de leur compagnon.

Dans ces conditions difficiles, les habitants ont trouvé un second souffle pour redonner une impulsion à l’activité socio-économique du village. Reprise du transport, acheminement des denrées alimentaires et aménagement des tentes sont aux mains des hommes. Cent-vingt-six avaient préféré ne pas travailler en ville afin de réorganiser leur foyer et de contribuer au bon fonctionnement du village. Toutefois, depuis la fin du ramadan début avril, ils y retournent, par urgence économique.

L'image montre un véhicule orange, probablement un fourgon, circulant sur un chemin de terre étroit et sinueux en montagne. À l'arrière du véhicule, plusieurs personnes sont assises, probablement en train de profiter de la vue. Le paysage environnant est sec, avec des rochers et quelques collines. Le ciel semble dégagé, ce qui suggère une belle journée pour voyager.
Transport des villageois en camion transit sur la piste de 17 kilomètres qui mène au village.
L'image montre une scène d'un village ou d'un camp de personnes. On peut voir plusieurs tentes ou petites habitations faites de matériaux simples. À gauche, un groupe de personnes semble s'affairer, tandis qu'un jeune garçon à vélo passe au premier plan. À droite, une femme est visible à l'entrée d'une tente. Le décor est marqué par une ambiance rurale, avec un terrain poussiéreux et quelques arbres dénudés en arrière-plan. L'atmosphère semble à la fois active et modeste.
Le camion transit arrive dans le centre du village. Abd Allahe (25 ans) est le copilote. Tout le long du trajet, il place des pierres derrière les roues arrière pour permettre au véhicule de repartir dans les côtes. En surcharge, le transit transporte jusqu’à 30 passagers.
L'image montre un groupe de femmes, probablement dans un village, rassemblées autour d'un homme qui semble distribuer quelque chose. Les femmes portent des vêtements traditionnels et des foulards colorés, et certaines semblent engager une conversation animée. En arrière-plan, on aperçoit des bâtiments en terre et des habitants qui observent la scène, créant une atmosphère communautaire. Les expressions des femmes varient entre curiosité et enthousiasme. Cela évoque un moment de partage et de solidarité dans leur communauté.
Les villageoises récupèrent leur lot lors d’une distribution de dons venant de l’Association El Kawthar (Casablanca).
L'image montre un homme assis sur les débris d'une structure, probablement après un événement destructeur. Il est vêtu d'une veste sombre et semble pensif. En arrière-plan, on aperçoit des montagnes et des éléments de la nature, tandis qu'un tissu jaune pend au-dessus de lui, ajoutant une touche de couleur à l'environnement. Le site apparaît en désordre, avec des matériaux éparpillés, suggérant des dégâts. L'ensemble dégage une atmosphère de résilience face à l'adversité.
Hussein id Kouri (48 ans) qui répare les appareils électroniques en avait une douzaine en dépôt au moment du séisme. Quatre personnes ont réclamé le remboursement. Les villageois se sont cotisés pour qu’il puisse le faire. Aujourd’hui il répare gratuitement des satellites dans les tentes.

Au gré des saisons, le village est devenu un véritable modèle de résilience. Épicentre des festivités pour les vallées voisines, il a célébré la semaine de l’Aid al-Adha, qui représente un retour aux origines de la culture amazighe, dans un intense moment de partage et d’engagement socioculturel.

L'image montre un homme assis dans une pièce intérieure d'une maison abandonnée ou en ruine. Les murs sont fissurés et une partie de la structure est visible, avec un mur coloré en jaune et rouge. À gauche, il y a une fenêtre en bois fermée. La lumière du soleil pénètre à travers une ouverture, illuminant l'espace. L'homme semble contemplatif, regardant par la fenêtre, dans une ambiance à la fois mélancolique et réfléchie. L'environnement évoque un sentiment de désolation et de nostalgie.
La Houcine Id Lamine (47 ans), président de l’association du village «  Abwab Wankriem pour la culture biologique et le tourisme  », dans sa maison en ruine. Coordinateur de la structure socio-économique du village, il gère l’ensemble des activités du village. 
Sur l'image, on voit un groupe de personnes rassemblées dans un paysage rural montagneux. Un homme est assis sous un arbre, tandis qu'un autre, appuyé sur une branche, semble interagir avec lui ou passer quelque chose. L'atmosphère paraît conviviale, avec des montagnes en arrière-plan et une lumière douce qui illumine la scène. Les personnes sont habillées de façon traditionnelle, ce qui indique un contexte culturel spécifique.
Durant les festivités de l’Aïd Al-Adha, les hommes effectuent une tournée des foyers pour récolter de l’argent qui sera reversé à l’association du village. Ils récitent une prière en guise de remerciement aux donateurs. Un verre d’eau sacré est transmis à la sœur de Mohammed Id Lamine (72 ans) (à droite). Celle-ci est souffrante et décèdera trois jours après.
L'image montre un groupe de jeunes filles, vraisemblablement lors d'une fête ou d'un événement culturel. Elles portent des vêtements traditionnels colorés, avec des broderies vives. On peut voir des collines en arrière-plan, suggérant un cadre rural ou montagneux. Certaines filles semblent interagir entre elles, tandis que d'autres regardent autour, intriguées par leur environnement. L'atmosphère est festive et vivante.
Des fillettes en tenue traditionnelle amazighe lors des célébrations de l’Aïd Al-Adha.
L'image montre un groupe de femmes rassemblées, chantant et dansant joyeusement. Certaines tiennent des tambours ou des instruments de musique, tandis que d'autres applaudissent. Les expressions sur leurs visages montrent de la joie et de l'énergie. À l'arrière-plan, on peut voir des enfants et des adultes se mêlant à l'événement, avec des ruines en pierre. L'atmosphère semble festive et communautaire, reflétant une célébration culturelle ou une réunion sociale. La diversité des vêtements et des couleurs ajoute à la richesse de la scène.
Chaque soir durant la semaine de l’Aïd Al-Adha, les femmes se rassemblent pour chanter, dans les ruines principales du village. Cet espace est le lieu de rassemblement pour toute célébration. Malgré les ruines, elles continuent de s’y rendre.
L'image montre un groupe d'hommes en train d'interagir dans un espace intérieur. Certains d'entre eux portent des vêtements faits de fourrure ou de poils, ce qui évoque une tradition culturelle ou une pratique artisanale. L'un des hommes est en cours d'habillage ou d'ajustement d'un vêtement, tandis que les autres observent. L'environnement est rustique, avec des murs en bois et des détails simples. L'atmosphère semble conviviale et centrée sur le partage d'une activité sociale.
Hassan Id Kourri (34 ans) revêt la peau de chèvre lors de la fête populaire de Boujloud durant l’Aïd Al-Adha.

La fête religieuse a surtout été l’occasion de fédérer les habitants pour défier la reconstruction grâce à l’organisation des villageois chapeautée par l’association du village « Abwab Wankriem pour la culture biologique et le tourisme ». Depuis juillet 2024, 28 familles sont rentrées chez elles, et 32 vivent encore sous la tente. Les villageois ont fait le choix de vivre une tradition qui leur est chère, sous le signe de la fierté d’un mode de vie amazigh.

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