Plus d’un an après le tremblement de terre qui a secoué l’ouest du Maroc, une partie des familles vivent encore sous des tentes, notamment dans les villages. C’est le cas de la plupart des habitants de Tizgui dans la province d’Al Haouz. Malgré la précarité, ils se sont organisés et entraidés — ce qui leur a permis de commencer à reconstruire, de préserver leurs traditions et leur mode de vie amazighs. La photographe Clémence Goubault les a suivis sur le long cours.
Situé au Maroc dans la province d’Al Haouz au bout d’une piste de 17 kilomètres, à 2 000 mètres d’altitude, le douar de Tizgui est totalement enclavé. Il abrite 1 380 villageois. La chute de rochers y est une menace constante qui pèse sur la sureté des habitations.
Après le séisme de septembre 2023, la précarité reste omniprésente à Tizgui. Les villageois vivent au rythme des tentes qui se déchirent, des maladies et des chutes de pierre. En mars et avril dernier, ils ont dû faire face à une épidémie de rougeole et même un cas d’infection microbienne qui a coûté la vie à un nouveau-né.
Face au cycle des naissances et des décès, au stress de la vie sous les tentes, les femmes s’entraident. Toutes ont prêté assistance aux femmes âgées (des tâches ménagères au soutien psychologique), aux femmes endeuillées et aux jeunes mères avec leur nourrisson.
Le village compte 243 enfants, et l’école reste un défi pour la plupart d’entre eux. Leur scolarité est assurée entre 6 et 12 ans par cinq enseignants, en complément de l’éducation coranique régie par l’imam du village.
Seule une infime minorité d’enfants (six) sont allées au collège à Marrakech lors de la dernière année scolaire. Sur les onze qui devaient y partir à cette rentrée, cinq ont dû rester auprès de leurs proches.
Dans ces conditions difficiles, les habitants ont trouvé un second souffle pour redonner une impulsion à l’activité socio-économique du village. Reprise du transport, acheminement des denrées alimentaires et aménagement des tentes sont aux mains des hommes. Cent-vingt-six avaient préféré ne pas travailler en ville afin de réorganiser leur foyer et de contribuer au bon fonctionnement du village. Toutefois, depuis la fin du ramadan début avril, ils y retournent, par urgence économique.
Au gré des saisons, le village est devenu un véritable modèle de résilience. Épicentre des festivités pour les vallées voisines, il a célébré la semaine de l’Aid al-Adha, qui représente un retour aux origines de la culture amazighe, dans un intense moment de partage et d’engagement socioculturel.
La fête religieuse a surtout été l’occasion de fédérer les habitants pour défier la reconstruction grâce à l’organisation des villageois chapeautée par l’association du village « Abwab Wankriem pour la culture biologique et le tourisme ». Depuis juillet 2024, 28 familles sont rentrées chez elles, et 32 vivent encore sous la tente. Les villageois ont fait le choix de vivre une tradition qui leur est chère, sous le signe de la fierté d’un mode de vie amazigh.
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