Chronologie des accords d’Oslo, 1991-2000

Le mur passant dans le village palestinien de Mas-Ha, près de Hebron..
ScottMontreal, janvier 2004.

1991

  • 31 octobre : Ouverture de la conférence de paix de Madrid.

1993

  • 9 et 10 septembre : reconnaissance mutuelle entre Israël et l’OLP.
  • 13 septembre : signature de la « Déclaration de principes sur les aménagements de l’autonomie provisoire » à Washington. Plus connue sous le nom d’« accord d’Oslo », elle instaure « une autorité palestinienne intérimaire pour une période transitoire n’excédant pas cinq ans, en vue d’un règlement fondé sur les résolutions 242 et 338 du Conseil de sécurité de l’ONU ». Elle est prévue en deux phases : la première, intérimaire, de trois ans au plus, avec une rétrocession progressive et partielle des territoires occupés à l’OLP ; la seconde de deux ans au plus, portant sur les questions centrales — Jérusalem, le sort des réfugiés, les implantations israéliennes (le texte ne parle pas de colonies), la sécurité, les frontières. Les deux parties s’engagent à ne pas porter préjudice aux négociations sur le statut final durant la période intérimaire, ce qui signifie en premier lieu l’arrêt de la colonisation. L’accord stipule la continuité du territoire palestinien.

1994

  • 25 février : Un colon de Kyriat Arba, Baruch Goldstein, ouvre le feu sur des fidèles musulmans priant au caveau des Patriarches, à Hébron : 29 morts. Alors que le débat sur l’évacuation des colonies s’est engagé dans la société israélienne, Yitzhak Rabin s’y refuse.
  • 6 avril : premier attentat-suicide du Hamas à Afula, en Israël. Neuf morts.
  • 4 mai : signature au Caire, avec près de huit mois de retard, du premier accord concrétisant la Déclaration de principes : l’accord sur l’autonomie de Gaza et Jéricho, première étape du retrait israélien (accord dit « Gaza-Jéricho d’abord » ou « Oslo I »). Un tiers de la bande de Gaza reste néanmoins occupée par environ 3000 colons (contre 1,6 million de Palestiniens environ).
  • 1er juillet : Yasser Arafat et une partie des fedayins entrent triomphalement à Gaza par la frontière égyptienne.

1995

  • 28 septembre : signature à Washington de l’accord intérimaire entre Israël et l’OLP, dit « Oslo II ». Il morcelle la Cisjordanie en zones selon un système complexe, imposé par les Israéliens : les zones A (2 % du territoire), sous contrôle civil et militaire palestinien, comprennent les grandes villes palestiniennes de Jénine, Tulkarem, Naplouse, Qaliqiliya, Ramallah, Bethléem et Jéricho. Les zones B (26 %), sous contrôle civil palestinien et un contrôle militaire conjoint, comprennent les villages palestiniens et diverses portions du territoire cisjordanien. Les zones C (72 %) sont entièrement sous contrôle israélien. Des retraits supplémentaires doivent avoir lieu dans les dix-huit mois à compter de la prise de fonction du Conseil palestinien, soit en octobre 1997. La vie quotidienne des Palestiniens empire. Les barrages se multiplient sur les territoires. Les habitants de Cisjordanie ne peuvent plus se rendre à Jérusalem. Israël continue à coloniser. En 1993, les colons étaient au nombre de 120 000. Ils seront plus de 200 000 en 2001, et 200 000 de plus à Jérusalem-Est, considérablement agrandie et annexée illégalement par Israël en 1980.
  • 26 octobre : assassinat à Malte, par des agents israéliens, de Fathi Chikaki, chef du Djihad islamique.
  • 4 novembre : Yitzhak Rabin est assassiné à Tel-Aviv par un fanatique juif d’extrême droite, Ygal Amir. Cet assassinat a été précédé d’une violente campagne de la droite contre le premier ministre. Le ministre des affaires étrangères Shimon Pérès (parti travailliste) le remplace jusqu’aux prochaines élections.
  • 13 novembre-26 décembre  : l’armée israélienne évacue Jénine, Naplouse, Bethléem, Tulkarem et Ramallah. Hébron n’est pas évacuée. L’armée y protège 300 colons juifs extrémistes qui vivent au milieu de la ville.

1996

  • 5 janvier : assassinat par le Shin Beth, les services de sécurité intérieurs israéliens, de « l’ingénieur » du Hamas Yahya Ayyash à l’aide d’un téléphone portable piégé.
  • 20 janvier : mise en place du Conseil de l’Autorité palestinienne. Yasser Arafat est élu président avec 87 % des voix. Le Hamas ne participe pas.
  • 25 février : un kamikaze palestinien se fait sauter dans un bus de Jérusalem, faisant 26 morts et 46 blessés. Le Hamas présente cet attentat comme la riposte à l’assassinat de son « ingénieur ». Shimon Pérès ordonne l’arrêt des négociations sur le retrait d’Hébron, prévues pour le 15 mai. D’autres attentats suivent. Sommé de « lutter contre le terrorisme », Yasser Arafat se lance dans une campagne de répression du Hamas et du Djihad islamique. Des centaines de responsables et de militants sont arrêtés, parfois torturés.
  • 11 avril : Shimon Pérès, pressé par les généraux et désireux d’apparaître comme un « dur », se lance dans une opération militaire d’envergure au Liban, baptisée « Raisins de la colère ». Il s’agit de riposter à des tirs de roquettes du Hezbollah sur Israël, eux-mêmes en représailles de meurtres de civils libanais par l’armée israélienne et ses alliés libanais. Le 18, à Kana, une bombe israélienne tombe sur une base de Casques bleus pleine de réfugiés, faisant 102 morts, dont des femmes et des enfants.
  • 29 mai : à cause de ce massacre, Shimon Perès perd les élections. Électeurs traditionnels du Parti travailliste, les Arabes israéliens se sont massivement abstenus, pour protester contre ce qui s’est passé à Kana. Benyamin Netanyahou (Likoud) est élu premier ministre avec 50,4 % des voix. Héritier de la pensée de Zeev Jabotinsky, le théoricien du « Grand Israël », il est opposé à la création d’un État palestinien et le dira dans une interview au quotidien israélien Haaretz le 22 novembre 1996 : « Les accords d’Oslo empruntent une direction peu acceptable… Oslo est habité par l’hypothèse que les deux parties veulent créer un État palestinien ». Il annonce la relance de la colonisation, qui n’a jamais cessé.

1997

  • 17 janvier : accord d’Hébron, qui divise la ville en deux parties. D’un côté, 400 colons. De l’autre, 300 000 Palestiniens. La colonisation se poursuit, notamment sur le Jebel Abou Ghnaim, au sud-est de Jérusalem, où se construit la colonie de Har Homa annoncée deux ans plus tôt. Une forte résistance populaire non violente s’organise contre cette dépossession, où s’engage notamment l’ancien maire d’el Bireh, Abdel Jawad Saleh.

1998

  • 23 octobre : accord de Wye Plantation, destiné à poursuivre les évacuations israéliennes. À l’issue de marchandages épuisants, les Palestiniens se voient attribuer le contrôle partiel ou total sur 40 % de la Cisjordanie.
  • 17 novembre : le gouvernement israélien revient sur l’accord. Il n’autorise que l’application de la première partie, alors que la Knesset l’a approuvé deux jours plus tôt. Finalement les Palestiniens se voient attribuer le contrôle de 28,6 % de la Cisjordanie, dont 10 % de zones entièrement autonomes et 18,6 % de zones sous contrôle administratif palestinien, mais sous tutelle militaire israélienne. Deux cent cinquante prisonniers sont libérés. Les Palestiniens s’apercevront que 150 d’entre eux sont des condamnés de droit commun.
  • 13 décembre : Netanyahou pose de nouvelles conditions à l’application de l’accord signé : les Palestiniens devront renoncer à proclamer leur État à la fin de la période intérimaire, cesser de demander la libération de prisonniers palestiniens coupables de « crimes de sang », saisir les armes « illégales »… En privé, des officiels israéliens affirment au journaliste Charles Enderlin qu’Arafat n’obtiendra « pas un pouce de terrain en plus ». Bill Clinton envoie une longue lettre à Yasser Arafat, dans laquelle il l’adjure de continuer le processus de paix.

1999

  • Mars : Sommet de Berlin. L’Union Européenne réaffirme son soutien à une solution négociée, reflétant les principes de « l’échange des territoires contre la paix » et salue la décision du Conseil national palestinien confirmant l’annulation de la disposition de la Charte historique appelant à la destruction d’Israël. Elle se déclare disposée à faciliter une conclusion prompte des négociations et presse les parties de s’abstenir d’activités qui en préjugent le résultat et de toute activité contraire au droit international. Elle se dit convaincue que la création d’un État palestinien démocratique, viable et pacifique sur la base des accords existants et à travers des négociations serait la meilleure garantie de la sécurité d’Israël et de l’acceptation d’Israël comme un partenaire égal dans la région et qu’elle le reconnaîtra le moment venu.
  • 4 mai : cinq ans après l’accord « Gaza Jéricho d’abord », la négociation sur le statut final devrait avoir abouti. Mais elle n’a même pas commencé et les accords intérimaires n’ont pas été mis en œuvre. L’OLP et l’Autorité nationale palestinienne entendent proclamer enfin leur État indépendant dans les frontières de 1967 et avec Jérusalem-Est pour capitale, sachant que la négociation, notamment sur l’application des droits des réfugiés, n’est pas encore aboutie. L’Union européenne et les États-Unis pressent la partie palestinienne d’ajourner cette décision pour ne pas gêner le parti travailliste lors des élections israéliennes anticipées ce même mois, quitte à renvoyer à une reconnaissance ultérieure —qui n’a toujours pas eu lieu.
  • 17 mai : Ehoud Barak est élu premier ministre avec 56 % des voix, à la tête d’une coalition rassemblant des partis religieux et le Meretz (à gauche des travaillistes). Cet ancien membre du commando Sayeret Matkal (unité des forces spéciales) est le « soldat le plus décoré d’Israël » et un intellectuel bardé de diplômes. La gauche voit en lui l’homme qui pourra conclure la paix. Mais dès son premier discours, il fixe des « lignes rouges », parmi lesquelles le refus de partager Jérusalem et de revenir aux frontières de 1967.
  • 14 septembre : signature du mémorandum de Charm el-Cheikh entre Arafat et Barak. Les transferts vont continuer en plusieurs étapes.
  • 25 octobre : ouverture du passage protégé, mais sous contrôle sécuritaire israélien très strict, entre Gaza et la Cisjordanie.
  • 3 novembre : à Oslo, remise du prix Nobel de la paix à Clinton, Arafat, Pérès, et à Yitzhak Rabin à titre posthume. Présent à la cérémonie, Barak se met d’accord avec Clinton et Arafat pour un calendrier. L’accord définitif doit être signé avant le 30 septembre 2000. Un canal parallèle de négociations secrètes est mis en place.
  • 8 novembre : négociations à Ramallah. Le chef de la délégation israélienne accepte que la résolution 242 en constitue le point de départ. Mais dès le lendemain, à Paris, Barak explique dans une conférence de presse que la résolution 242 ne s’applique pas à la Cisjordanie, car son annexion par la Jordanie en 1948 n’avait pas été reconnue par le droit international… Dans le même temps, il s’engage dans une négociation avec la Syrie sur le plateau du Golan, annexé par Israël en 1967. Les États-Unis soutiennent ces pourparlers, qui constituent une diversion et qui échoueront.

2000

  • 4 janvier : nouveau retrait israélien dans le cadre du deuxième redéploiement. L’autorité palestinienne se voit remettre 40 % de la Cisjordanie : 11,1 % en zone A, sous contrôle civil et militaire palestinien, 28,9 % en zone B, sous administration civile palestinienne, mais sous contrôle militaire israélien. Les autres 60 % sont en zone C, entièrement sous occupation israélienne. Le troisième redéploiement n’est toujours pas à l’ordre du jour.
  • 31 mars : à l’occasion de l’anniversaire de leur implantation, Ehoud Barak rassure les colons d’Hébron sur leur « droit à vivre en sûreté dans la ville des patriarches ».
  • 10 mai : ouverture en Suède des négociations secrètes sur l’accord final. Les Israéliens proposent de ne restituer que 76,6 % de la Cisjordanie. Les Palestiniens refusent.
  • 15 mai : Barak fait finalement voter par son gouvernement le transfert de trois faubourgs palestiniens de Jérusalem-Est. Le même jour, heurts à l’occasion de la commémoration de la Naqba. À Ramallah, Jénine et Gaza, jets de pierre puis échanges de tirs : 4 morts et 200 blessés palestiniens, 8 soldats israéliens blessés. La rue palestinienne est à bout.
  • 21 mai : retrait israélien du Sud-Liban à la suite d’une longue guérilla menée par la résistance palestinienne, dont le Hezbollah apparaît à cette date comme la principale composante.
  • 10 juin : mort du président syrien Hafez Al-Assad. La négociation avec la Syrie a échoué.
  • 14 juin : Ehoud Barak propose à son gouvernement de réduire la surface des faubourgs de Jérusalem-Est où il entend que les Palestiniens établissent leur capitale en lieu et place de Jérusalem-Est. Il refuse toujours d’effectuer le troisième redéploiement. Selon lui, il devra avoir lieu en même temps que la négociation finale. William Clinton propose d’arbitrer un sommet avec Yasser Arafat et Ehud Barack à Camp David, lieu de villégiature des présidents américains, pour négocier et signer l’accord final entre Israéliens et Palestiniens.
  • 15 juin : Yasser Arafat est reçu par Bill Clinton à Washington. Il insiste sur le troisième redéploiement et sur une préparation minutieuse de Camp David. Il se dit prêt à des rectifications mineures de frontières, à un arrangement sur le retour des réfugiés, mais sur la base de la résolution 194 des Nations unies. Il reste ferme sur le partage de Jérusalem, sans lequel il ne peut y avoir de paix. Il obtient de Bill Clinton la promesse qu’il ne sera pas tenu responsable en cas d’échec.
  • 25 juin : en vue de Camp David, Shlomo Ben Ami, alors ministre israélien de la sécurité intérieure, propose à Arafat 78 % de la Cisjordanie, plus 10 % « progressivement ». Arafat lui répond : « nous ne sommes pas prêts ». Ni la question des réfugiés, ni celle de Jérusalem n’ont été réellement discutées. Le président palestinien demande un mois supplémentaire de négociations. Les Américains n’ont fait aucune préparation diplomatique. Les leaders du Proche-Orient, en particulier le président égyptien Hosni Moubarak, n’ont pas été consultés.
  • 28 juin : à Ramallah, Yasser Arafat tente de convaincre la secrétaire d’État américaine Madeleine Allbright qu’il est trop tôt pour le sommet. Ehoud Barak, en mauvaise posture chez lui, veut au contraire accélérer les choses. Les Américains se rangent à son avis.
  • 11-25 juillet : Camp David. Clinton tente de résoudre en quinze jours le conflit du Proche-Orient alors que tout reste à régler, en particulier les problèmes centraux : les frontières et Jérusalem. Les négociations se déroulent dans une ambiance tendue. Barak s’en remet à Clinton et refuse tout tête-à-tête avec Arafat. Israël propose un État palestinien coupé en quatre. Concernant Jérusalem, il accepte pour la première fois le principe d’une négociation, mais refuse toute souveraineté politique palestinienne sur Jérusalem-Est. Les Palestiniens réclament le droit international comme base de négociation ; la partie israélienne le refuse. C’est l’échec. Bill Clinton en rejette la responsabilité sur Yasser Arafat dans des termes insultants. Il déclare à la presse : « Le premier ministre Barak, peut-être parce qu’il s’y était préparé depuis plus longtemps, peut-être parce qu’il y a accordé plus de réflexion, s’est davantage avancé que le président Arafat, particulièrement sur la question de Jérusalem ». Des diplomates américains, chevilles ouvrières des négociations, se montreront très sévères pour Bill Clinton. C’est le cas de David Aaaron Miller, selon lequel la délégation américaine s’est contentée de s’aligner sur les positions israéliennes, la pratique étant de ne présenter aucune idée aux Palestiniens sans avoir d’abord obtenu le feu vert des Israéliens. La propagande israélienne lance un mot d’ordre : Arafat aurait refusé « l’offre généreuse » d’Ehoud Barak. L’argument sera repris par les soutiens d’Israël pendant des années, même si les ultimes négociations, début 2001, à Taba, montreront qu’il était possible d’aller beaucoup plus loin. Les Palestiniens, eux, ne communiquent guère, laissant le champ libre à la version israélo-américaine. En Palestine occupée, la colère gronde d’autant plus que la colonisation ne cesse de s’intensifier.
  • 28 septembre : Ariel Sharon, chef de l’opposition, monte sur l’Esplanade des mosquées, protégé par un dispositif mis en place par Ehoud Barak de centaines de policiers. Un geste provocateur : depuis 1967, les Israéliens s’abstiennent de pénétrer sur cette Esplanade.
  • 29 septembre : à l’issue du prêche du vendredi à la mosquée d’Al-Aqsa, de jeunes Palestiniens lancent des pierres sur les fidèles juifs priant au pied du mur, en contrebas. La police israélienne fait irruption sur l’Esplanade. Quatre morts, de nombreux blessés. Les images déclenchent des réactions un peu partout dans les territoires palestiniens. C’est le début de la deuxième intifada, ou « intifada Al-Aqsa ». La répression sera très vite massive et meurtrière.

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